PDCI : Bedie For Ever ?

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du Parti Démocrate de Côte d’Ivoire, Henri Konan Bédié, le sphinx de Daoukro, reste impassible malgré le vent de contestation qui souffle dans les rangs de son propre parti.

À 79 ans, Henri Konan Bédié n’est pas encore disposé à passer la main. Cela fait pourtant près de vingt ans qu’il est à la tête du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI). Une longévité que d’aucuns remettent en question, comme Kouadio Konan Bertin, le leader des jeunes de la formation, qui a lancé la guerre de succession. Autre problème pour Bédié, les élections locales du 21 avril ont accentué les dissensions avec le Rassemblement des républicains (RDR) du président Alassane Ouattara, pour lequel il avait appelé à voter lors du second tour de la présidentielle de 2010. Des cadres du PDCI s’estiment, à tort ou à raison, lésés dans le partage du pouvoir.

Celui qui succéda à Félix Houphouët-Boigny en 1993 semble donc engagé dans une partie serrée pour assurer son maintien à la tête du PDCI lors du prochain congrès, en octobre. Théoriquement, son âge lui interdit de postuler. Mais, prétextant que les accords de Marcoussis avaient supprimé la limite d’âge pour être candidat à la présidentielle de 2010, Henri Konan Bédié prépare une modification des statuts de sa formation. À la manoeuvre : son neveu, Niamien N’goran, délégué départemental, et Moïse Koumoué Koffi, chargé de la commission des statuts. Tout doit être finalisé lors d’une réunion qui se tiendra en juillet dans son fief de Daoukro, en pays baoulé, dans le centre-est de la Côte d’Ivoire.

Si le choix du prochain leader du PDCI importe tant, c’est qu’il conditionne la stratégie à mettre en oeuvre dans le cadre de la présidentielle de 2015, pour laquelle Alassane Ouattara a d’ores et déjà annoncé sa candidature. Avec la reconduction de Bédié, fidèle allié de l’actuel président, une candidature PDCI est en effet incertaine, le « sphinx de Daoukro » pouvant choisir de s’effacer face au candidat RDR.

Pour Kouadio Konan Bertin, fer de lance de l’opposition interne à Henri Konan Bédié, c’est impensable. Il a trouvé un allié de circonstance en la personne du secrétaire général du parti, Alphonse Djédjé Mady, dont le poste pourrait disparaître si les réformes souhaitées par Bédié étaient appliquées. Difficile à accepter pour celui qui est en fonction depuis 2002. Comme Bertin, il est de ceux qui estiment que le PDCI n’est pas suffisamment remercié dans le cadre de l’alliance politique ayant amené Ouattara au pouvoir et qui refusent de ne pas présenter de candidat en 2015.

Dents longues

D’autres jeunes loups lorgnent la belle machine PDCI, qu’ils aimeraient rénover afin d’en faire un tremplin pour accéder un jour au fauteuil présidentiel. Il y a ceux qui ne se déclareront pas pour l’instant et visent probablement 2020, comme l’ambitieux Patrick Achi, ministre des Infrastructures économiques, ou l’avocat Jeannot Ahoussou-Kouadio, ancien Premier ministre, aujourd’hui ministre sans portefeuille rattaché à la présidence. Il faut également compter avec Jean-Louis Billon, le ministre du Commerce, qui a songé un temps prendre une très haute fonction dans les instances du parti, et ne pas oublier Charles Konan Banny. À 70 ans, l’ancien Premier ministre devenu président de la Commission Dialogue, Vérité et Réconciliation rêve de se présenter à la présidentielle de 2015. Il y voit sa dernière chance de briguer la magistrature suprême.

Les prétendants au trône du PDCI oseront-ils déboulonner Bédié ? Rien n’est moins sûr. « Qui se risquera à endosser le rôle du parricide en tuant le successeur d’Houphouët ? interroge un analyste politique. La plupart ne bougeront pas car Bédié reste un faiseur de rois à qui ils doivent beaucoup. »

Si Henri Konan Bédié est réélu, scénario pour l’instant le plus vraisemblable, certains pourraient faire scission, comme en 1994 lorsque Djéni Kobina avait quitté le navire pour fonder le RDR, emmenant au passage une partie des troupes. « Banny et Kouadio Konan Bertin vont créer leur parti et chercher à nouer une alliance avec le Front populaire ivoirien [FPI, parti de Laurent Gbagbo] », croit savoir le même analyste. Un autre bon connaisseur de la vie politique du pays relativise : « Dans ce pays, c’est celui qui tient la bourse qui commande. Tant que Banny ne mettra pas la main à la poche, personne ne le suivra. »

Bédié connaît bien les problèmes de succession pour avoir lui-même, ouvertement et trop tôt, brigué la place d’Houphouët-Boigny. Le père de l’indépendance, malgré l’affection qu’il lui portait, a jalonné son parcours d’obstacles. D’abord en entretenant la concurrence avec Philippe Yacé, l’ex-président de l’Assemblée nationale, puis en ôtant à Bédié le titre de dauphin constitutionnel lorsque celui-ci prit la tête de cette même Assemblée et, enfin, en faisant appel à Alassane Ouattara pour gouverner. « Dans le groupe akan dont je suis issu, avait lâché Houphouët-Boigny en 1985, du vivant du chef, que ce soit au niveau d’une région ou d’une famille, personne ne doit connaître le nom de son remplaçant*. » Nul doute que le discret Henri Konan Bédié a retenu les leçons du « Vieux ».

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