Nim, L’immortel

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Déjà une semaine que nous sommes orphelins. Nous, lecteurs du Patriote et journalistes au Quotidien, habitués des chroniques croustillantes de Bakary Nimaga. Le jeudi 13 juin dernier, notre « Fama de la plume » a effectué son ultime voyage, sa dernière mission. Décédé brutalement et brusquement deux jours plus tôt à l’âge de 47 ans, notre collègue  laisse à la postérité un héritage important dans le monde de l’art, des  lettres et du journalisme. Trois disciplines dans lesquelles « Nim » excellait. De l’avis de tous, il a été un très bon journaliste. Un chroniqueur hors-pair, mais surtout un combattant intrépide pour la démocratie dans notre pays.

 Bakary Nimaga a eu droit, de son vivant, à un hommage de la République qui, à travers la Grande chancellerie de l’Ordre national, l’a élevé au grade de Chevalier dans l’ordre du mérite ivoirien. Un moment exceptionnel dans la vie de ce journaliste qui s’est battu  depuis 1998, pour l’instauration d’un nouvel ordre politique en Côte d’Ivoire. N’est-il pas mieux d’être célébré pendant qu’on a encore un souffle de vie, ici-bas, parmi les siens, que de l’être à titre posthume ? Même sans cette médaille qui lui été décernée  en janvier dernier, Bakary avait atteint les sommets de la notoriété.  « Nim » a été violenté par la soldatesque, il s’est retrouvé à plusieurs reprises devant des juges ou à la Brigade de gendarmerie.  Il a écrit souvent la peur au ventre, car  les kalachs n’étaient pas loin.  Avec lui, nous nous sommes cachés plusieurs fois dans des domiciles privés, un peu partout à Abidjan, pour ne pas nous taire devant le « Pouvoir des blakoros ».  Par moment, comme le roseau qui plie sous la pression du vent, il a été gagné par le découragement. Mais, « Nim » n’a jamais renoncé. Durant son parcours professionnel, il aura fait montre d’une constance dans sa philosophie.  La gloire, pour cet homme humble, tenait moins à une vie de star qu’à la reconnaissance de son talent par un public exigent, qui est sous le choc partout dans le monde.

Bakary tenait à la démocratie comme à la prunelle de ses yeux.  Il  était un homme libre: libre de ses choix, autonome de ses engagements. La liberté, il en faisait une obsession. C’est pour cela qu’il écrivait à n’en point finir. Si la parole est liberté pour certains, chez « Nim », c’était plutôt la plume qui lui permettait de s’affirmer, de s’affranchir,  de s’émanciper.  Bakary manipulait les Lettres à sa guise. Raison pour la quelle il a inspiré beaucoup de jeunes journalistes, mais aussi, ses chroniques ont formé sur la toile, une chaine d’admirateurs qui l’adulaient presque. Comme cette dame que nous avons du consoler le jour de l’inhumation : « Quand je ne lis pas Motus je suis malade. Vraiment, il écrivait bien ce journaliste », a-t-elle lancé. En effet, la disparition de Bakary laisse un grand vide au cœur du système  en place à la rédaction dont il était le numéro trois. Et demain ?

Le plus grand hommage que nous puissions lui rendre, c’est celui de perpétuer son œuvre afin que ce monde du journalisme qu’il a marqué de son emprunte, ne l’oublie pas de sitôt. Le Patriote saura se souvenir, à l’image d’un club de football qui se sépare du numéro de maillot d’un joueur qui a marqué, par ses performances, l’histoire du club. Le 6 de Aldair à l’AS Roma, le 3 de Facchetti à l’Inter Milan, le 25 de Zola à Chelsea, le 10 de Baggio à Brescia, le 5 de Zidane au Réal de Madrid, sont des numéros fétiches, soigneusement retirés et conservés.  « Motus », la rubrique que Bakary a animée sans interruption de 2007 à 2013, sera donc rangée au panthéon des réalisations marquantes du Patriote. D’ailleurs, y  a-t-il un talent comme le sien pour prendre la relève ? Nous n’en sommes pas sûrs. Il était unique. Il avait son style à lui. Il avait son idéal dont personne ne pouvait le distraire. Motus, en définitive, se confondait à sa personne, tant il avait fini par en faire son affaire. Qu’il soit présent à son poste ou permissionnaire, Bakary savait que cet espace au bas de la page 4 du journal, était le sien.   Pour nous, « Nim » est immortel. Il nous a quittés physiquement, mais son œuvre demeure. Elle l’est parce que vous, lecteurs et lectrices, l’avez décidé ainsi. Séchons les armes et continuons de poser des pas sur le long chemin  de l’instauration de la démocratie, de façon durable, dans notre pays

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