Côte d’Ivoire : La Clé De La Paix Se Trouve à La CPI

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Comme l’épée de Damoclès, l’éventualité d’une comparution devant la Cour pénale internationale (CPI) plane sur la tête de certains protagonistes de la crise post-électorale en Côte d’Ivoire. Le sujet est devenu un serpent de mer, alimentant ainsi les médias au bord de la Lagune Ebrié. Après le transfèrement de Laurent Gbagbo devant la juridiction internationale, la question qui taraude les esprits est de savoir qui tiendra bientôt compagnie à « l’enfant de Mama » dans les geôles de la Haye. En effet, dans une interview que le ministre de la Justice, Garde des sceaux, Gnenema Coulibaly, a accordée à la Radio télévision ivoirienne (RTI), il est ressorti que « le général de la rue », le sulfureux Charles Blé Goudé, pourrait être transféré à la Cour pénale internationale pour crimes contre l’humanité. Cette annonce du ministre, qui, d’ailleurs, est une bourde, ne manquera pas d’être diversement commentée par les Ivoiriens.

Si la Justice ivoirienne s’estime compétente pour juger Simone Gbagbo dans la sérénité, l’on peut cependant se poser la question de savoir si elle peut juger un certain Charles Blé Goudé sans courir le risque de provoquer un chahut homérique en Côte d’Ivoire

Ainsi, pour les pro-Ouattara, une telle éventualité serait du pain bénit dont ils se saisiront pour rabattre le caquet à tous ceux qui avaient crié victoire à la suite du renvoi du procès de Laurent Gbagbo pour insuffisance de preuves. Ceux de la galaxie Gbagbo développeront toujours leur argumentaire traditionnel, qui consiste à soutenir la thèse selon laquelle la CPI est un instrument au service des vainqueurs et que de ce fait elle fait la part belle à ceux d’en face. Quoi qu’il en soit, la Côte d’Ivoire, qui est engagée aujourd’hui dans un processus de réconciliation nationale, ne peut pas passer par pertes et profits la question de la justice nationale ou internationale, en procédant à une amnistie systématique de ceux de ses fils et filles qui se sont illustrés avant et après les élections par une barbarie digne des temps les plus sombres du Moyen-âge. Il est donc heureux de saluer la courageuse décision du gouvernement ivoirien de faire juger l’ex-première dame, Simone Gbagbo, par la Justice ivoirienne. Ce procès qui va bientôt se dérouler en terre ivoirienne permettra à l’opinion nationale et internationale de juger de la capacité de la Justice ivoirienne à conduire un procès conformément aux normes d’un Etat de droit. La Justice ivoirienne joue donc sa crédibilité. Au-delà de l’institution judiciaire, c’est l’ensemble du système démocratique ivoirien qui sera mis à rude épreuve. Il revient, par conséquent, au président Alassane Dramane Ouattara de donner les gages, à l’occasion du procès de Simone Gbagbo, que la démocratie en Côte d’Ivoire n’est par un leurre, une démocratie bananière où le sacré saint principe de la séparation des pouvoirs relève du mythe.
Cela dit, si la Justice ivoirienne s’estime compétente pour juger Simone Gbagbo dans la sérénité, l’on peut cependant se poser la question de savoir si elle peut juger un certain Charles Blé Goudé sans courir le risque de provoquer un chahut homérique en Côte d’Ivoire. Car, Blé Goudé représente le pion le plus controversé du système Gbagbo. Pour ses nombreux partisans, l’ancien compagnon de Guillaume Soro au sein de la Fédération estudiantine et scolaire de Côte d’Ivoire (FESCI), Blé Goudé, est le patriote intraitable, le nationaliste, l’anti-impérialiste téméraire, bref, le militant achevé dont l’exemple doit inspirer la jeunesse ivoirienne voire africaine.

La Cour pénale internationale doit, si Blé Goudé venait à être transféré à la Haye, faire preuve de diligence pour ne pas donner l’impression de traîner trop les pieds. La CPI ne doit plus reproduire les pas de tango que l’on a pu observer pendant la procédure engagée par ses propres soins contre Gbagbo

Pour ses détracteurs, et ils sont nombreux également en Côte d’Ivoire, Blé Goudé est un activiste sans état d’âme, qui a contribué par le caractère violent de ses tirades et les thèmes populistes qu’il a développés, à installer la Côte d’Ivoire dans une logique d’affrontements et de haine dont le pays aura du mal à se relever. Un éventuel procès de Blé Goudé en Côte d’Ivoire fera reprendre du service à ces nombreux pro et anti Blé Goudé, toute chose qui pourra fragiliser le processus de réconciliation en cours.
C’est pourquoi l’on peut souhaiter que le « gourou de la galaxie des patriotes » soit jugé à La Haye, loin des passions morbides dont font preuve encore certains protagonistes de la crise ivoirienne.
La Cour pénale internationale doit, si Blé Goudé venait à être transféré à la Haye, faire preuve de diligence pour ne pas donner l’impression de traîner trop les pieds. La CPI ne doit plus reproduire les pas de tango que l’on a pu observer pendant la procédure engagée par ses propres soins contre Gbagbo. L’on se souvient, en effet, qu’après plusieurs mois d’instruction, la CPI est revenue à la case départ pour dire que le dossier Laurent Gbagbo était insuffisant. Une telle démarche a eu l’inconvénient de faire languir certains Ivoiriens qui espèrent toujours le retour de l’ancien président. Certes, la CPI a son rythme de travail, mais elle ne doit pas oublier qu’en ce qui concerne la Côte d’Ivoire, la clef de la paix se trouve entre ses mains.

 

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