Enquête Exclusive – Lutte Contre Le Phénomène Des Margouillats : Véritable Travail d’Hercule

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Le monde des usuriers ou margouillats, appellation à l’ivoirienne, est un monde clos et pourtant prospère. Si prospère et nuisible qu’il est devenu un phénomène social qui gangrène une bonne frange de la population des fonctionnaires, agents de l’Etat et du privé et même les retraités. Une véritable mafia qui a les tentacules partout, jusque dans des secteurs que l’on ne saurait imaginer. Les margouillats, prêteurs d’argent dont les taux d’intérêt oscillent entre 40 et 50 %, évoluent et sévissent dans les milieux cités plus haut. La première condition exigée à leurs clients, est d’avoir  un compte courant, domicilié dans une banque ou autre institution financière. Le mode opératoire des margouillats est simple mais très efficace. Sans publicité aucune, leurs tentacules vont, s’étendant chaque jour. – Soit par attaque frontale : aux alentours des banques et des agences du Trésor Public, ils abordent leurs proies et leurs proposent leur produit. – Soit par personnes interposées, le système de bouche à oreilles y est très efficace : lorsqu’un travailleur est en ‘’difficulté’’, une de ses relations déjà initiée, lui propose l’adresse d’un margouillat et l’affaire est réglée. Lors d’une rencontre avec un groupement de personnes, toute honte bue, se faisant appeler  ‘’ Association des Victime des Usuriers’’, Mme Anne Désirée Ouloto, Ministre de la Solidarité, de la Famille, de la Femme et de l’Enfant, a pris la résolution de diligenter une « enquête sociale » par ses services afin de mieux apprécier l’ampleur du phénomène et prendre des décisions rigoureuses pour y mettre fin. La pratique de l’usure existe en Côte d’Ivoire depuis de nombreuses décennies. Souvenons-nous ou rappelons l’époque de la maison de crédit aux fonctionnaires, la ‘’Cotivoirienne d’équipement’’. Cette maison permettait aux fonctionnaires de prendre à crédit, des meubles et appareils électroménagers, sur présentation du bulletin de salaire. Les margouillats sévissaient déjà à cette époque. Ils encourageaient leurs clients qui avaient besoin d’argent frais, à prendre des marchandises à crédit, marchandises qu’ils rachetaient à vil prix. Le travailleur pouvait prendre des marchandises d’une valeur de 300 000 FCFA que le margouillat lui rachetait à 200 000, voire moins. Le phénomène a la peau dure. A Abidjan la capitale, comme dans de nombreuses autres villes du pays, il sévit. Pour entrer sans difficulté dans leurs fonds, les margouillats débordent d’imagination. Ils ont mis en place un système presqu’infaillible. Pour un prêt de 60 000 FCFA au taux d’intérêt de 50 %, le créancier doit rembourser les 60 000 + 30 000, soit  90 000 FCFA. Bien avant, c’est le carnet de chèques ou la carte bancaire qui est remise au margouillat comme garantie. En prélude à toutes  ces précautions, une autre garantie, la plus sécurisante, est souvent prise au sein des banques en nouant des complicités avec certains agents. Dès que les virements sont positionnés, les margouillats sont les premiers informés par leurs relais, moyennant une commission. Ainsi, ils sont toujours les 1ers  devant les agences financières.  Autre alternative, payer une partie des 90 000 F, soit 50 000 F et calculer le taux d’intérêt des 40 000 F. Ce qui revient à 40 000 F, plus 20 000 F, soit 60 000 F à payer au prochain virement, si le client ne revient pas augmenter la mise. Et voilà le cercle infernal mis en place pour un parcours sans zone d’arrivée. Comment des fonctionnaires, travailleurs, pères de familles et retraités en arrivent là ? « Vous savez, nous percevons un salaire qui, malgré toutes les précautions, ne suffit jamais pour faire face à nos dépenses. Les loyers sont très élevés, ne parlons pas du transport, de l’électricité, de l’eau et des frais de santé et de scolarité. Tout cela pour vous dire que c’est la cherté de la vie qui nous y entraine », nous confie un travailleur qui flirte avec les margouillats. La pratique de l’usure, un phénomène dont les racines sont profondément encrées dans la société ivoirienne, contre lequel, le Ministre Anne Ouloto veut lutter, voire y mettre fin. « L’usure est interdite dans notre pays. Je veux qu’ensemble, avec le gouvernement, avec le Ministre en charge de la Solidarité et la Famille, avec la Commission Nationale de la Famille qui sera bientôt mise en place, que nous puissions sensibiliser toutes les familles de Côte d’Ivoire, à revoir notre mode de vie. Pourquoi avez-vous des problèmes si vous êtes rigoureux avec vous-mêmes ? Si vous vivez sur la base d’un budget familial ? », S’était-elle interrogée, face aux victimes des margouillats. Véritable bataille herculéenne que veut livrer le Ministre Anne Ouloto. Afin d’apporter sa contribution à la lutte contre ce cercle vicieux et infernal qu’est l’usure, une victime déclare : « Merci Madame, mais sachez que c’est une grande mafia qui est organisée, souvent avec la complicité de certains banquiers. La solution, c’est d’augmenter de façon conséquente le salaire des fonctionnaires. En effet, tant qu’ils crouleront sous le poids des dettes, les travailleurs seront la proie d’escrocs de tous genres ». L’objet réel de la démarche des dites ‘’victimes des margouillats’’ a-t-il été évoqué au cours de cette rencontre ? N’est-ce pas là, une manière subtile de demander une augmentation salariale et souhaiter une lutte plus accrue contre la cherté de la vie ? L’aspect le plus perceptible de la lutte contre les margouillats ne serait-il pas, si elle était engagée, de les chasser des abords des banques ? Ce qui avait été tenté, il y a quelques années. Cependant, comment peut-on empêcher un fonctionnaire, un retraité dans le besoin financier urgent, d’aller vers un margouillat pour solliciter un prêt malgré le taux d’intérêt exorbitant ?  Les anglais diraient « Wait and see ».

 

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