A moins de deux ans de la future élection présidentielle ivoirienne, beaucoup d’Ivoiriens encore traumatisés par la crise post-électorale de 2010-2011, appréhendent cette nouvelle échéance électorale. Les différentes directions des partis politiques sont déjà entrées en « laboratoire » pour étudier et élaborer diverses stratégies de campagne. Les militants attendent les résultats pour entrer à leur tour en scène. Mais, pour la majorité de la population ivoirienne, l’issue de cette élection à venir peut-elle être différente de la précédente ? La question identitaire qui est à l’origine du drame ivoirien a-t-elle été évacuée ? L’Ivoirien est-il désormais prêt à concevoir la nationalité telle que la définit le droit, et n’ont elle qu’elle est construite par les idéologues des partis politiques ? Est-il possible qu’un jour, un blanc, de nationalité ivoirienne, soit élu président de la République ? Et cetera.
Le mal ivoirien : les questions identitaires et foncières
Voilà un sujet anxiogène dans le contexte socio-politique ivoirien, pollué par cette problématique identitaire qui dure depuis près de vingt ans. Aujourd’hui encore, la question demeure plus que jamais d’actualité. Certains idéologues, passés experts dans l’art de la manipulation politique des populations, vont jusqu’à coupler cette problématique à celle du foncier. Cela crée de fait, et de manière volontaire, un amalgame dangereux dans l’esprit des populations. Lorsqu’on fait croire aux populations que des étrangers veulent diriger la Côte d’Ivoire pour donner leurs terres aux« étrangers », nous sommes là au cœur même du « mal ivoirien ». Malheureusement, ce discours populiste trouve aujourd’hui encore un écho très favorable dans l’esprit d’une partie de la population. Emprisonnés dans cette manipulation politique suicidaire, ces femmes et ces hommes restent toujours ancrés dans leurs certitudes en dépit de nombreuses réalisations sociales, économiques et diplomatiques mises en place depuis l’arrivée au pouvoir du Rassemblement des Houphouétistes pour la démocratie et la paix (Rhdp).
Un Ivoirien blanc, candidat à l’élection présidentielle
Lorsqu’on observe la classe politique ivoirienne, il est frappant de constater qu’il n’y a aucun Ivoirien blanc parmi les principaux et seconds acteurs. La question identitaire est telle qu’elle ne laisse aucune possibilité à un Ivoirien d’origine étrangère de s’introduire dans le système. Pendant de nombreuses années après l’indépendance de la Côte d’Ivoire, la principale force du système politique ivoirien résidait dans sa diversité ethnique, culturelle et identitaire. Après la mort du président Félix Houphouët-Boigny, elle est devenue sa principale faiblesse et a complètement stigmatisé et cloisonné la société ivoirienne, de manière à la rendre figée et intolérante. Sur la base de toutes ces nombreuses intoxications psychiques relatives à la notion identitaire, l’identité ivoirienne se résume désormais uniquement au patronyme ou à la couleur de la peau. Dans ces conditions, comment peut-on imaginer un Ivoirien de couleur blanche candidat à l’élection présidentielle ? Curieusement, il pourrait avoir plus de succès à cette élection qu’à celle de la présidence d’un parti politique national, où ses chances sont considérablement limitées.
La couleur de sa peau prendra le dessus sur ses compétences
C’est connu, nos principales formations politiques sont jusqu’à présent constituées sur des bases ethniques et religieuses. Qu’il soit d’origine libanaise, française, américaine ou autre, et né en Côte d’Ivoire de père et de mère, eux mêmes de nationalité ivoirienne, il aura toujours le fâcheux défaut d’être un blanc en dépit de sa nationalité ivoirienne. Lors des meetings ou débats publics, certaines personnes lui demanderont de leur désigner son village en Côte d’Ivoire, et cela, sans même se soucier du caractère ridicule de la question. Tout sera mis en œuvre pour lui signifier qu’il s’est trompé de lieu pour militer, proposer ses idées, son projet de société et son programme de gouvernement. La couleur de sa peau prendra le dessus sur ses compétences, son expérience et l’amour de son pays.
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