Afrique : Ce Que 2014 Nous Reserve

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De Rabat à Kinshasa, l’Afrique va connaître des hauts et des bas. Mais cette année encore, la croissance sera globalement au rendez-vous. Et la réduction de la pauvreté ?

L’Afrique dans toute sa diversité ! L’année qui se profile montrera, une fois encore, la multiplicité des économies du continent. On verra par exemple le PIB de la RD Congo augmenter de plus de 10 % en 2014, tandis que sa voisine, la Centrafrique, plongée dans une grave crise sécuritaire, affichera un taux de croissance inférieur à 0,2 %.

Nouveaux modèles

On verra aussi les pays maghrébins, confrontés à des transitions économiques et politiques difficiles, poursuivre leur quête de nouveaux modèles pour se relancer.

Pris dans son ensemble, le continent affichera, comme depuis plus d’une décennie, une croissance économique robuste, avec un taux de 5,3 %, nettement au-dessus de la moyenne mondiale, qui ne s’établira qu’à 3,6 % d’après les dernières prévisions du Fonds mondial international (FMI). Avec une moyenne d’un peu plus de 6 % en 2014, les dragons et les tigres asiatiques feront à peine mieux que le continent.

Mais aujourd’hui, il ne s’agit plus de se féliciter de ces performances macroéconomiques. D’autant que la hausse des cours des matières premières, qui a porté la croissance ces dernières années, va commencer à ralentir.

Désormais, la véritable question est celle-ci : comment réduire la pauvreté ? S’il est important de développer les grandes infrastructures, Francisco Ferreira, économiste en chef de la Banque mondiale pour l’Afrique subsaharienne, propose de donner la priorité aux projets qui touchent les plus pauvres, notamment en milieu rural.

Afrique du Nord

La morosité s’accroche

En 2014, la croissance sera bien au rendez-vous au Maghreb, mais elle ne sera pas flamboyante : 3,8 % pour le Maroc et 3,7 % pour l’Algérie et la Tunisie, selon les prévisions du FMI. Si bien que la situation sociale de la région, marquée par un chômage des jeunes estimé à 30 % par la Banque mondiale, risque de s’aggraver. Dans ce contexte morose, les différents gouvernements nord-africains n’auront d’autre choix que de se préoccuper de leurs finances publiques, déjà bien mal en point.

L’Algérie, dont l’excédent commercial est en baisse, devrait accélérer sa politique de diversification de l’économie. De ce point de vue, le lancement, prévu en octobre, de l’usine d’assemblage automobile du français Renault, près d’Oran, sera une étape importante pour le pays – après celle, bien entendu, de l’élection présidentielle du mois d’avril.

De son côté, le Maroc a, grâce à une bonne production agricole, bien résisté à la crise européenne en 2013. Mais il doit lui aussi entreprendre des changements structurels majeurs.

Le nouveau gouvernement, formé le 10 octobre, doit poursuivre la fameuse réforme de la Caisse de compensation, promise dès l’arrivée au pouvoir des islamistes du Parti de la justice et du développement, fin 2011. Sa mise en oeuvre n’a été que timidement initiée en septembre 2013, sur les carburants.

Relances

En Tunisie, le déficit budgétaire ne cesse de se creuser, représentant 20 % des charges de fonctionnement et d’investissement de l’État, soit environ 7 % du PIB. En 2014, le gouvernement doit répondre aux injonctions de la Banque mondiale et du FMI de mettre fin aux subventions sur les carburants ou de les réorienter vers les populations à faible revenu. Il doit aussi relancer le secteur touristique, crucial pour le pays, qui ne s’est pas encore remis du Printemps arabe.

En Libye et en Égypte, la situation est plus chaotique, notamment sur le plan sécuritaire. Cette question restera la priorité des deux États en 2014. L’économie égyptienne est en déroute, après une croissance atone de 1,8 % en 2013, bien loin des 6 % jugés nécessaires par les économistes pour que soient garantis les grands équilibres macro-économiques du géant de 84 millions d’habitants. Sans apaisement des relations entre les militaires au pouvoir et leurs opposants islamistes, le plan de relance annoncé restera lettre morte.

L’Union du Maghreb arabe (UMA) reste, dans un tel contexte, un voeu pieux pour 2014. Les échanges entre pays maghrébins ne représentent que 3 % du commerce dans la région. Timide espoir pour les développer : les associations patronales, qui veulent pousser le monde politique à déverrouiller les frontières, prévoient de lancer, en février à Marrakech, l’Union maghrébine du commerce et de l’investissement. Un premier pas vers l’intégration ?

Afrique de l’Ouest

Championne de la croissance

Cette année encore, l’Afrique de l’Ouest devrait caracoler en tête des blocs régionaux, avec une croissance largement au-dessus de la moyenne du continent. Elle affichera, d’après les prévisions de la Banque africaine de développement (BAD) et de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), un taux moyen de plus de 7 % (contre 6,7 % en 2013).

Cette performance sera notamment portée par les trois mastodontes que sont le Nigeria, le Ghana et la Côte d’Ivoire, qui verront leur PIB croître entre 6 % et 8 %, selon le FMI. Naturellement, ce trio retiendra davantage l’attention des investisseurs durant les douze prochains mois.

Redressement

Avec l’appui des bailleurs de fonds internationaux, la Côte d’Ivoire va poursuivre son redressement postconflit en maintenant les investissements publics dans les infrastructures. « Puis les investisseurs prendront progressivement le relais de l’État », estime un analyste financier.

Pendant ce temps, au Ghana, l’incertitude qui a prédominé pendant le premier semestre de 2013, après l’élection présidentielle de décembre 2012 et la contestation qui s’en est suivie, devrait céder la place à la confiance.

Mais les autorités de ce pays riche en cacao, en or et en pétrole doivent limiter leurs dépenses pour réduire le déficit budgétaire (7 % du PIB en 2013).

Défis

Pour le Nigeria, qui se rêve en future première économie du continent, 2014 sera l’année de tous les défis.

D’abord parce que Goodluck Jonathan et son équipe doivent éviter de tomber dans des rivalités politiques stériles à l’approche de l’élection présidentielle de 2015.

Ensuite parce qu’ils doivent veiller à la désignation d’un gouverneur crédible pour succéder au très charismatique Sanusi Lamido Sanusi à la tête de la banque centrale, fin juin. Considéré comme le principal artisan de la réforme du système bancaire, l’homme a réussi à rendre le pays de nouveau fréquentable pour les investisseurs.

Outre ces trois pays, le Sénégal et le Mali sont également à suivre. Deux ans après son élection, Macky Sall doit donner un nouveau souffle à l’économie via un plan stratégique qu’il dévoilera en tout début d’année. Ibrahim Boubacar Keïta doit quant à lui remettre de l’ordre dans la maison après la grave crise politico-militaire que le pays a traversée entre 2012 et 2013.

Globalement, les pays de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) avanceront dans leur processus d’intégration, avec le lancement de projets d’infrastructures régionales comme l’autoroute Abidjan-Lagos. Après leur décision, fin octobre 2013, de mettre en place un tarif douanier extérieur commun à partir de janvier 2015, ils devront s’entendre avec l’Union européenne dans le cadre des accords de partenariat économique, et ce avant octobre 2014. À cette date, la Côte d’Ivoire et le Ghana, les deux premiers producteurs mondiaux de cacao, perdront leur accès privilégié aux marchés européens.

Afrique centrale

Retard à rattraper

L’intégration régionale devrait également franchir un cap au sein de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac).

En juin 2013, les chefs d’État ont signé un accord prévoyant la suppression, dès le 1er janvier, des visas d’entrée au Gabon et en Guinée équatoriale pour les ressortissants de la zone. Mais c’était compter sans la versatilité de Teodoro Obiang Nguema : en novembre, le président équato-guinéen a décidé de faire bande à part.

À la traîne

Un coup dur pour la Cemac qui, comparée aux communautés d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique de l’Est, est déjà à la traîne en matière d’intégration. Et qui ne brille pas non plus sur le plan économique, malgré toutes ses richesses en ressources minières et pétrolières. Après avoir achevé 2013 sur une piètre moyenne de 2,6 % de croissance, elle table sur 5,3 % cette année.

En 2014, c’est d’abord le Tchad, dont l’économie est dopée par la production pétrolière et l’agriculture, qui tirera les performances de la zone, avec une croissance de 10,5 %. De son côté, le Gabon, qui a massivement investi dans les infrastructures et a entrepris de diversifier son économie, maintiendra sa croissance à près de 7 %. Pendant ce temps, en Guinée équatoriale, 2014 sera à l’image de 2013. Le pays connaîtra une nouvelle année de récession (- 1,9 %, selon le FMI). Tandis que la Centrafrique, en proie à une grave crise sécuritaire, ne dépassera pas les 0,2 % de croissance (contre – 14,5 % en 2013).

Stabilité

En dehors de la Cemac, une fois n’est pas coutume, c’est la RD Congo qui offre les meilleures perspectives.

Le colosse d’Afrique centrale, en passe de retrouver une certaine stabilité politique et sécuritaire avec la défaite de la rébellion du Mouvement du 23-Mars (M23), pourrait atteindre une croissance à deux chiffres, soit 10,5 % (contre 6,2 % en 2013).

Ce dynamisme doit beaucoup au secteur minier, à l’agriculture et à la construction. Mais il est surtout le résultat du travail d’amélioration du cadre macroéconomique effectué par le Premier ministre, Augustin Matata Ponyo, et son équipe. L’inflation est par exemple passée de 23,5 % en 2010 à 4,4 % en 2013. Mais pour assurer une croissance durable, la RD Congo devra maintenir sa stabilité politique et la sécurité dans l’est du pays.

 

Jeuneafrique.com

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