Le Procès De Simone Gbagbo En Question

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Les premières dames en Afrique ! Elles font des envieuses dans le rang de la gent féminine. Elles se hissent, du jour au lendemain, au sommet, avec les honneurs dus à cette ascension. De gré ou non, les feux des projecteurs les découvrent, les unes fort imbues de cette nouvelle posture qui leur inspire la grosse tête, pendant que les autres, plus discrètes et moins ostentatoires, font l’effort difficile d’avoir réellement la tête sur les épaules. Obnubilées par les honneurs, le prestige et les privilèges découlant de leur nouveau statut, certaines premières dames laissent libre cours à l’erreur. Du sommet de leur montagne, elles ont ridiculement dégringolé, recevant de ce fait un désaveu populaire qui a fait d’elles la risée de ceux qui les vénéraient.

En Côte d’Ivoire, Simone Gbagbo s’est inscrite sur ce registre. C’est en effet la seule ex-première dame à se retrouver dans les liens de la justice ivoirienne pour son implication présumée coupable dans la crise post électorale. Pourquoi n’a  t- elle pas chanté à Laurent Gbagbo ces douces berceuses qui, en l’espace d’une nuit, pouvaient le transformer et provoquer le retour à la raison ? Pourquoi n’est-elle pas parvenue à enclencher avec lui ce dialogue sincère qui, dans l’intimité des quatre murs du domicile conjugal présidentiel, aurait pu nous éviter l’impasse meurtrière ? En vérité, face aux velléités de son époux à étaler son ego et à confisquer le pouvoir, Simone Gbagbo n’a pas su trouver le remède approprié pour l’en dissuader. Pire, elle serait devenue actrice d’un plan machiavélique qui aurait arraché de précieuses vies humaines. Elle est donc poursuivie et son procès s’ouvre le 22 octobre prochain.

Détail intéressant, la cofondatrice du Front populaire ivoirien (Fpi) sera jugée à Abidjan. Les autorités ivoiriennes n’ont pas donné une suite favorable à la Cour pénale internationale (Cpi) qui a constamment réclamé son transfèrement à la Haye. Le dossier est loin de quitter ces vagues qui ébranlent l’opinion. Pour la foule des pontes du Fpi, le refrain est connu : c’est la « justice des vainqueurs ». Avec cette formule, ils se lancent ainsi dans une réaction instinctive à une affaire qui est pourtant tout sauf banale. C’est peut-être l’écrivain Georges Bernanos qui a raison de traiter le polémiste d’homme aberrant. A vivre de polémique, on se condamne le plus souvent à 0demeurer dans les préjugés. Pour ce dossier, il vaut mieux éviter de parier d’emblée sur le fait que Simone Gbagbo est totalement immaculée. Car l’affaire en elle-même exige qu’on se libère de la passion. Il s’agit de la vie de milliers d’êtres innocents.

Il est évident que, nul n’aime perdre au tribunal, même s’il se reconnaît dans les faits à lui reprochés. On se démène, on s’ingénie à trouver des arguments, on use d’arguties, aux fins d’une éventuelle disculpation. C’est la preuve que le commun des mortels, en face de ce qui le déshonore, cherche toujours ce qui l’honore, à tout prix, à n’importe quel prix, sans désemparer, et prêts à tous les coups, quels qu’en soient le prix à payer. Et le procès de l’ex-première dame n’échappera pas à cette caractéristique. Dire par réflexe que Simone Gbagbo est innocente pour polémiquer par devoir n’empêchera pas la manifestation de la vérité, « l’âpre vérité » disait Tanton. Disons-le, et ceci est plus fort que les considérations les plus folles, le procès de l’épouse de Laurent Gbagbo peut livrer des révélations inattendues et des certitudes à donner le vertige. Il est à l’honneur de la démocratie ivoirienne que le dossier soit déjà confié à la justice à qui revient le privilège de rendre justice. Ce n’est pas la prophétie ambiante du reniement qui changera la liberté des juges à faire la lumière sur cette affaire.

La « maison justice » a heureusement pris l’habitude de se moquer de tout ce qui a ses racines dans les spéculations. Elle a sa propre logique et tranchera sur des faits et des preuves. Elle ne fera pas des sondages pour connaître ceux qui sont pour ou contre Simone Gbagbo. Elle apportera juste des réponses à une question cruciale : l’accusée est-elle coupable de génocide et de crime contre l’humanité ? Qu’on laisse donc la justice faire tranquillement son travail. Soyons prudents et patients sans nous réfugier dans la mécanique négative et cette espèce de préconçus qui poussent à dire « c’est faux » devant des signes non négligeables du vrai.

Par le Dr ALEXIS GEORGES KOUNOUHO

georexk@gmail.com

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