De l’interdiction des produits décapants : Le suivi, un talon d’Achille du gouvernement

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Il arrive à temps, le décret pris en conseil des ministres, interdisant la commercialisation (et l’utilisation) des produits cosmétiques décapants en Côte-d’Ivoire. Belle initiative à saluer, car cela ne relève ni plus, ni moins que d’une question de santé publique. Combien sont-elles nos sœurs, surtout celles des grandes agglomérations africaines à avoir recours à ces produits, juste pour attirer le regard émerveillé des hommes ? Ce n’est pas pour autant que les zones rurales sont épargnées. Bien au contraire. Le phénomène est devenu plus évolutif qu’une gangrène rampante. Nos mères, sœurs et filles, semblent inconscientes des effets néfastes sur la santé de la peau. Et pourtant qu’elle est belle cette couleur noire, couleur d’ébène que nos sœurs ont tendance à tant renier. Le poète ne chante-t-il pas :

« J’aime la femme, la belle femme noire !

Cette femme aux seins de montagne,

La femme au teint, couleur pure d’ébène,

Celle qu’on ne retrouve qu’en Afrique noire » ?

Et pourtant, ces beautés qui s’ignorent, cherchent à se défaire de leur belle couleur, tandis que d’autres se bronzent, pour avoir une couleur chocolat. Paradoxe des paradoxes.

La dépigmentation ou la ruée vers la peau blanche

Êtes-vous pour ou contre le blanchiment de la peau, le décapage ou bleaching? « La dépigmentation n’est rien d’autre que la neutralisation des défenses naturelles du corps. Exposant celui-ci aux attaques de tous genres. Le pigment appelé mélanine, est à la race noire, ce que la couche d’ozone est à la planète Terre. Si cela est difficile à comprendre pour les femmes analphabètes et déscolarisées de nos villes, cela l’est moins pour l’élite féminine qui pourtant, semble également y trouver le sésame, à même de charmer le sexe opposé », explique un professeur. Pour rire de la situation pourtant dramatique, (manière de sensibiliser dans la dérision) des ivoiriens les appellent « les blanches de Treichville-Sur Marne ». Ils ont bien raison car, en vérité, combien d’hommes Ivoiriens importants, appelés les ‘’En Haut de en Haut’’, ont à leur côté, une femme à teint noire? Et combien de femmes qui ont ‘’réussi’’, portent-elles encore cette belle peau noire d’ébène ? Jetez un regard inquisiteur depuis le sommet de l’Etat jusqu’à la base et vous serez édifiés. Combien sont-elles encore, ces femmes totalement ‘’bio’’, femmes naturelles non retouchées ? Dès cet instant, regardez attentivement les affiches des publicités au bord des routes, suivez notre télévision nationale, regardez avec une attention particulière les stars, les artistes Ivoiriens, les leaders d’opinions. Sur 10 de ces personnes qui attirent les regards, font des émules dans leur spécialités, combien sont ‘’bio’’ et combien sont ‘’transgéniques’’? De manière inconsciente, notre société elle-même classe les ‘’bio’’ dans une catégorie à part, celle des ‘’gaou’’. Au cours de ma petite investigation, deux filles se sont confiées : « Lorsque je marche ou je me trouve avec des filles au teint clair, la majorité des hommes, puisque c’est eux les appréciateurs, s’extasient et ont plus tendance à regarder du côté des filles claires que de nous autres, de teint noire. Elles sont appelées « lumière ». Et pour des filles qui ne sont pas fortes dans la tête, elles vont chercher par tous les moyens, à devenir claires pour qu’on les remarque aussi. D’où l’ampleur démesurée que prend ce phénomène chez nous et sous d’autres cieux ».

« Moi je suis fière de mon teint hein. Je ne cherche pas l’appréciation des gens et ça m’énerve au contraire parce que je les rends responsables du complexe de « noirceur », complexe qui pousse de plus en plus de filles si belles avec des teints de rêve, à se blanchir la peau de manière exagérée », conclut la seconde. Mais combien sont-elles à garder la tête froide sous nos tropiques ?

Des produits chimiques mortels

En Afrique Noire, il existait et existe encore, des femmes au teint couleur de café grillé, des teints allant du noir brillant au noir chocolat, des femmes couleur de l(ébène de nos forêts, qui faisaient la fierté et symbolisaient notre continent, il y a quelques années. Aujourd’hui, dans la plupart des villes africaines, on remarque que les femmes au teint noir naturel, sont en voie de disparition car devenues denrée rare. La majeure partie de nos sœurs, nos mamans et même nos frères, pratiquent la dépigmentation de la peau, communément appelée « tchatcho ». Ce phénomène prend un essor inquiétant en Afrique.

Origine de cette pratique honteuse

« La dépigmentation de la peau est née aux Etats Unis dans les années 60, dans la communauté noire. Le pouvoir blanchissant de l’hydroquinone fut découvert sur des ouvriers travaillant dans le milieu du textile (fabrication de jean) et du caoutchouc. On utilise ce produit pour délaver les jeans et il sert d’anti oxydant sur le caoutchouc. Il est aussi utilisé dans les peintures et huiles. C’est parce que ces ouvriers noirs travaillaient sans être protégé qu’à la longue, ils ont pu voir l’effet que ce produit toxique avait sur eux. C’est alors, que depuis, il fut utilisé pour se blanchir la peau, et le phénomène se propagea vers le continent africain », rapportent des chercheurs. Pourquoi les hommes et les femmes s’éclaircissent-ils la peau ? A quoi ces personnes sont-elles exposées ? Les filles se dépigmentent pour ressembler aux filles naturellement claires de peau, aux métisses! Et pourquoi ? En grande partie, du fait que les hommes préfèrent ces filles là. Si les hommes se retournaient tout autant vers les filles noires naturelles que vers les filles claires naturelles, beaucoup moins de filles à teint noir, se dépigmenteraient. Et ce sont ces mêmes hommes qui viennent clamer ensuite : « Moi je préfère les filles naturelles », arrêtons l’hypocrisie.

Des campagnes de sensibilisation ‘’choquante’’ et un suivi strict de l’application de cette loi

Aux grands maux, les grands remèdes. Produire et afficher partout, de grands panneaux montrant le désastre des produits décapants sur la peau. Pour une question de santé publique, l’on ne doit pas faire dans la dentelle en disant prendre des précautions pour ne pas blesser les ‘’âmes sensibles’’. Ensuite, on passera à la vitesse supérieure de la répression sans état d’âme. Car si cette loi est bien appliquée, elle mettra fin aux souffrances de nos mères, nos sœurs et nos filles. Les produits cosmétiques décapants sont de plusieurs types. Il y en a qu’on vend légalement en pharmacie et qui sont utilisés par les gens d’une certaine classe et ceux vendus dans tous les coins de ruelles. Qu’on ne nous dise pas après qu’il ne s’agit que de produits contrefaits. Que le décret soit appliqué à la lettre et de nombreuses vies seront sauvées. Nous attendons donc de voir l’application. Parce qu’ici, on prend les décrets mais leur application est autre chose. Où en est l’interdiction des voitures à vitres teintées et plaques banalisées, le portable au volant, celle de fumer dans les lieux publics, des sachets plastiques, etc.? Il faut que nos sœurs apprennent à être de ce qu’elles sont, au lieu de vouloir paraître.

Khalil Ben Sory

Lementor.net

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