Afrique/Développement : les freins aux échanges commerciaux interafricains

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L’Afrique, depuis l’ère coloniale, a été et se considère elle-même comme un réservoir et un pourvoyeur de matières premières au monde industrialisé et émergent alors qu’avec son potentiel humain évalué à 1 milliard d’habitants et à 2 milliards en 2050 selon plusieurs estimations dont on ne peut douter peine à rattraper son retard de développement. Pourquoi donc ce vaste marché pèche-t-il en matière de commerce régional, en matière d’échanges commerciaux intra africains ? Pourquoi les immenses possibilités en matière de ressources humaines et de matières premières ne sont-elles pas pleinement exploitées dans les échanges inter-etats? Le bon sens voudrait expliquer ce déficit par des obstacles sur le chemin de l’intégration économique régionale, de l’existence de rigidités des frontières physiques ou du moins des lourdeurs des procédures administratives, de la corruption et autres freins à la mise en valeur des potentialités démographiques donc consommatrices des populations du continent noir. Les grands ensembles régionaux aussi bien politiques qu’économiques tels que la Cedao, la Cemac, la Ceac, la Sadc,le Comesa, Cen-sad, ou même Uemoa , dont on peut timidement saluer l’existence et les efforts pour résoudre le problème, n’ont pas encore pu permettre aux africains d’avoir entre des zones de libre-échanges ou s’exécreraient des échanges commerciaux en gros volumes pour stimuler l’investissement, encourager la croissance soutenue et créer des emplois pour cette masse humaine qui compte en son sein 70% de la population âgée de moins de 30 ans. Ce qui aurait permis de parier sur le dividende démographique demeure encore une vaste zone de pauvreté accrue malgré la croissance économique encourageante de ces dernières années, une vraie bombe à retardement, un terreau fertile aux conflits et à l’instabilité politique. Afrique Centrale, Burundi, Somalie, les exemples sont malheureusement légion. Loin d’être un argument faible, le manque d’infrastructure de base est aussi un gros frein au développement de l’Afrique et selon une étude de la Banque Mondiale intitulée « Infrastructures africaines : une transformation impérative », « l’état déplorable des infrastructures dans l’Afrique subsaharienne – ses infrastructures d’électricité, d’eau, ses routes et sa technologie de l’information et des communications (TIC) – freine la croissance économique des pays de 2 % chaque année et limite la productivité des entreprises jusqu’à 40 %. ».. Mais sincèrement comment des économies africaines qui sont malheureusement des économies extraverties c’est-à-dire tournées vers l’extérieur pourraient-elles insuffler une dynamique d’échanges commerciaux entre pays africains et entre populations africaines ? Que peut vendre la Cote d’Ivoire, 1er exportateur de cacao au Ghana voisin lui-même 2 eme exportateur de cacao ? Ils sont tous deux exportateurs de matière première agricoles et minières. Le Nigeria est par exemple le premier partenaire économique de la Cote d’Ivoire, bien avant la France, 2 ème rang et la Chine, 3 eme rang. Mais il faut s’empresser de préciser que les échanges entre la Cotre d’Ivoire et le Nigeria membre de l’Opep et la Cote d’Ivoire est composé exclusivement de carburant vu l’incapacité du géant ouest africain à raffiner son million de baril/jour de pétrole, pour ensuite importer du raffiné de la Cote d’Ivoire pour sa consommation locale. Dans chaque pays africain, on produit ce qu’on ne consomme pas et en consomme ce qu’on ne produit pas, même les denrées alimentaires. L’importation du riz en Côte d’Ivoire, est un bel exemple de ses incongruités africaines. En effet, la Cote d’Ivoire selon Dagobert Banzio, ancien ministre du commerce de la Cote d’Ivoire de 2011 à 2012, « la Cote d’Ivoire couvre près de 38% des besoins de la consommation intérieure estimée à 1 600 000 tonnes en 2010. » indiquait-il dans une allocution a la Conférence Mondiale du Riz, ténue les 20 et 21 octobre 2011, à Ho Chi Minh ville au Vietnam. Edifiant ! Ainsi le vrai obstacle, il faut bien s’y résoudre, est que les pays africains ne produisent rien qu’ils pourraient échanger entre eux, vu le faible tissu industriel qu’ils possèdent tous, obligé d’importer des produits manufacturés de l’Europe et de l’Asie. Pour un pays qui tire de la fierté à être un pays agricole, « le progrès de ce pays repose sur l’Agriculture » disait le père fondateur Felix Houphouet Boigny, qui possède de la terre et de la ressource humaine en grande quantité pour produire le riz (l’agriculture représente environ 25% du PIB et 47% de la population vit en milieu rural selon la Banque Mondiale) il y a la une orientation stratégique à élaborer afin d’assurer la sécurité alimentaire du pays. L’Afrique se découvre peu à peu, et au gré de la mondialisation et de la forte urbanisation de sa population, au cœur de de la société de consommation qu’est devenu le monde, ce village planétaire. Les Africains qui se modernisent dans leur habitude commerciale consomment des biens d’équipement, des téléphones, des voitures, des fours à micro-ondes, des grilles pains, des jouets, des chaussures, des vêtements, presque tous fabriqués en Asie ou en Europe. L’Afrique se contente donc de consommer en créant des emplois dans les pays exportateurs de bien de consommation devenant ainsi un vaste marché pour les nouveaux pays émergents, la Chine en tête. L’un des domaines les plus emblématiques de l’émergence d’une société de consommation en Afrique est le marché des nouvelles technologies. L’Afrique est passée de 51 millions d’abonnés en 2003 à 400 millions en 2012 et on estime aujourd’hui que la téléphonie mobile représente près de 2% du PIB des pays Africains. Des chiffres qui parlent, des chiffres prometteurs. Aujourd’hui 65% de la population Africaine peut avoir accès à un réseau 2, 3 ou 4G. En Afrique 80% des utilisateurs de Facebook se connectent sur mobile et représentent 100 millions d’utilisateurs. Et pourtant les acteurs clés des Tic sont bel et bien Microsoft, Apple, Goggle, Nokia, Facebook, twitter, Orange. Le commerce régional ou le commerce entre états africains est donc inexistant par ce qu’il n’a rien à échanger entre eux. Dans la réalité, il n’y aura de vrais échanges commerciaux entre pays africain lorsque les capacités entrepreneuriales des privés en Afrique pourront offrir des offres aux consommateurs locaux. Le secteur privé, c’est connu est le fer de lance de la modernisation de vie, la fabrication des biens d’équipement et de produits donnant de la valeur ajouté aux ressources disponibles, proposés aux consommateurs du continent permettront des échanges au niveau régional. Pour qu’il ait échange il faut bien des produits à échanger et seul le secteur privé peut jouer ce rôle de moteur actif dans les initiatives entrepreneuriales. Le potentiel humain africain, 1 milliard d’habitants d’habitant, et 2 milliards en 2050, ne sera pour les africains eux-mêmes un marché à conquérir que lorsque une classe d’acteurs du privé, agressive, opportuniste, et réaliste tentera par des offres adaptés de faire des affaires, de faire du commerce. De vouloir s’enrichir. Bakary Cisse, Blogueur, Développement

Bakary Cisse

Analyste en questions de developement

 

 

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