Un membre de la galaxie patriotique attaque Blé Goudé à 24 de la reprise de son procès‏ – Idriss Ouattara : Ma lettre à Charles Blé Goudé.

0
19

J’ai longtemps hésité avant de t’écrire cette lettre publique. Le poids de nos relations personnelles mais surtout la situation très délicate de ton statut de prisonnier à la Haye m’ont plusieurs fois retenu. Mais parfois, il y a des circonstances qui ne nous laissent vraiment pas le choix.
Le 22 Mars 2014, quand tu as été injustement déporté à la Haye, c’est avec les larmes aux yeux que je t’ai adressé cette lettre mémorable parue dans la presse. De ton extradition du Ghana a ta déportation à la Haye, je n’ai jamais cessé de soutenir ta cause et j’ai fait front face à toutes les attaques contre toi. Aujourd’hui, ma conscience me taraude et m’impose de te parler afin d’attirer ton attention sur certains faits. Je m’en voudrai d’être lâche et irresponsable. Car l’attachement à un chef ne se nourrit pas seulement de soutiens tous azimuts mais aussi de conseils. J’aurais peut-être gardé le silence si, ce vendredi 21 aout, tu n’avais pas reçu Madame Kili à la Haye. 

Charles, a l’occasion de la conférence de mise en état à la Haye le 1er mai 2014, tu clamais haut et fort : ‘’Madame le juge, j’étais pro Gbagbo hier, je suis pro Gbagbo aujourd’hui et je resterai pro Gbagbo demain’’. Tous les résistants étaient fiers que tu aies pleinement et sans complexe assume non seulement notre combat mais surtout que tu n’aies pas renié notre symbole Laurent Gbagbo par l’effet de la prison.
Plus tard, le 02 octobre 2014 lors de l’audience de confirmation des charges, tu séduisais le monde entier dans une prestation oh combien inoubliable dans laquelle tu valorisais le combat souverainiste et panafricain dont tu as été le fer de lance durant les 10 années de notre résistance contre l’impérialisme.

Mais Charles, depuis quelques mois, cette image de grand combattant s’effrite chaque jour un peu plus à cause de certains choix politiques qui sèment le doute dans la conscience de cette jeunesse qui t’a pris comme repère.
Dans le conflit interne au FPI opposant le camp Gbagbo au camp Affi, tu as opté pour la neutralité. 
Charles, dans un conflit ordinaire de positionnement d’acteurs au sein d’un parti politique auquel tu n’appartiens pas, la neutralité a un sens. Mais dans un conflit idéologique qui met aux prises d’une part, les partisans de la capitulation de notre combat qui collaborent avec nos bourreaux et, d’autre part, ceux qui défendent la souveraineté et la liberté, la neutralité a été difficile à comprendre pour les combattants. 
Dans ce conflit très clair, il n’y avait pas de 3eme voie ou de voie médiane quoique tu ne sois pas membre du FPI. Car en fait, ce conflit n’est que le prolongement de notre combat dans la rue depuis 2002 contre les impérialistes dont tu as été le fer de lance pendant 10 ans. La seule différence cette fois est que l’impérialisme a utilisé une main interne pour liquider notre combat.

Ce vendredi 21 Aout 2015, tu recevais Madame Kili, la compagne d’Affi N’Guessan a la Haye. 
Je connais les liens profonds qui vous unissent depuis plusieurs années. Mais en raison du caractère très sensible de la crise interne au FPI qui implique directement le Président Gbagbo avec qui tu vis dans cette prison et qui a refusé de recevoir Affi, tu aurais dû t’abstenir. 
A tort ou à raison, certains pensent qu’en le faisant, tu donnes une certaine prime à la ligne qu’elle incarne même si telles n’étaient pas tes intentions. 
Les ivoiriens ne comprennent pas ta démarche surtout que le camp d’Affi est aujourd’hui complice du régime Ouattara dans l’arrestation et l’emprisonnement de nos camarades Hubbert Oulaye, Lida Kouassi, Danon Djedje, Assoa Adou, Raphael Dogo, Koua Justin, Dahi Nestor, Alain Zagol, Cissé Mariam de France….

Charles, tu dois faire corps avec le Président Gbagbo en toutes circonstances et ne jamais te démarquer même d’un iota parce qu’il est la clé de l’avenir de notre camp. Sans lui nous ne sommes rien. Tu dois aussi faire corps avec son parti politique le FPI qui est le pilier de notre combat quoique tu n’en sois pas membre. 
Une bonne entente avec le FPI est gage d’un avenir certain. C’est pourquoi, je pense que la création de ton parti politique, quoique nécessaire parce que tu as toujours clame que tu n’étais pas FPI, n’était pas moins précipité. J’avais rêvé voir la création de ce parti a l’issue de notre combat qui vous sortirait de prison le Président Gbagbo et toi. Beaucoup d’ivoiriens auraient donné leur caution à ce parti comme la reconnaissance de la souffrance que tu as enduré toutes ces années en prison pour eux, loin de ta terre natale. C’est à juste titre aujourd’hui que certains se demandent où va le général ? 

Charles, si les ivoiriens deviennent de plus en plus critiques envers toi c’est parce qu’ils t’aiment et qu’ils ne voudraient pas te voir dans l’erreur. C’est parce qu’ils veulent retrouver leur général, le grand combattant que tu as été ces dix années de la résistance contre l’oppresseur. L’adage dit que ‘’qui aime bien chatit bien’’. Un leader on le critique, on l’attaque et parfois même on l’humilie. Mais il garde la tête haute et poursuit son chemin. S’il est vrai que le leader ne doit pas se laisser guider par la masse comme tu l’as toujours réitéré, le leader doit écouter la masse sinon il peut se fourvoyer. Surtout, quand on est à mille lieux et qu’on n’a pas toujours des sources d’informations diversifiées. 
C’est pourquoi, je pense que tu dois froidement dissocier les critiques objectives des ivoiriens et ne pas les assimiler a de la haine contre ta personne qui peuvent te conduire à des erreurs dommageables.
Charles reste toi-même, soit patient. Nous comprenons tous que tu es en procès et que cela peut t’amener à prendre certaines positions que tu n’aurais peut-être pas prises si tu avais été dehors. Nous savons que les circonstances ne sont plus les mêmes, mais sache que c’est par la politique seule et par notre combat acharné contre Ouattara que vous retrouverez, le Président Gbagbo et toi la liberté et non par le droit. Dans cette prison ou tu es détenu par les impérialistes dans l’isolement total, on ne sait pas quand on en sort surtout pour un jeune plein d’ambitions pour son pays. Si pénible soit-il et quelque soit le temps que cela prendra, ne doute pas, ne trébuche pas, ne chancelle pas, ne te compromets pas. Libère ton cœur des frustrations et des rancœurs parce qu’elles sont mauvaises conseillères.
C’est à ta gloire si Dieu a voulu que tu sois à la Haye. Tu dois faire en sorte à préserver ton capital politique et à sortir de cette prison la tête haute parce que d’importants challenges t’attendent en Côte d’Ivoire. 
Tu sais mieux que moi qu’en politique il n’y a pas d’acquis définitifs et que le combat doit être permanent pour le leader même en prison. Tout tient parfois sur du fil.
Je reste convaincu que tu ne seras jamais la ‘’honte de notre génération’’. Charles, si tu veux agir sur la vie politique en Côte d’Ivoire depuis la Haye, il peut avoir des tiraillements défavorables. Confie-toi au seigneur et ne fais rien d’autre que préparer ton procès. Tout l’avenir est devant toi. Cette crise est hautement spirituelle et le dessein de Dieu s’accomplira forcement dans ce pays. Dehors, c’est tous les jours que nos prières remontent vers le seigneur pour le Président Gbagbo et toi. 
Nous restons convaincus que la lumière jaillira très bientôt. Les signes sont là.

Charles, si ma lettre a été publique je m’excuse parce que tous les silences ne sont pas bons à observer. Si je t’ai offensé, je m’excuse. Si des mots t’ont bafoue je m’incline parce que je sais que tu souffres déjà en prison. Pour ma part, je reste toujours dispose à t’apporter ma modeste contribution à ton procès parce ta déportation a la Haye est celle de tous les résistants ivoiriens. 
Que le seigneur te fortifie.

IDRISS OUATTARA ex-président des Parlements et Agoras de Côte d’Ivoire en exil.

Auteur :

Source :

Commentaires facebook

Mettez votre commentaire

LAISSER UN COMMENTAIRE

Please enter your comment!
Please enter your name here