Les cinq défis de la Côte d’Ivoire selon le Premier ministre Daniel Kablan Duncan

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Notre Invité Afrique de ce mardi 17 mai était de passage à Paris pour présenter le Plan national de développement 2016-2020 pour la Côte d’Ivoire. Le Premier ministre ivoirien, Daniel Kablan Duncan, a reçu RFI pour détailler ses priorités économiques pour les cinq ans à venir. Il s’exprime sur la lutte contre le chômage des jeunes, la réforme du secteur éducatif, le terrorisme et son impact sur l’économie, mais aussi la filière cacao, et puis par ailleurs des sujets plus politiques. Daniel Kablan Duncan répond aux questions de Léonard Vincent.

Quels sont, selon vous, les défis majeurs que doit relever la Côte d’Ivoire en termes économique pour les cinq ans à venir ?

Daniel Kablan Duncan : Les défis majeurs sont au nombre de cinq. Le premier défi, c’est la poursuite de la bonne gouvernance en Côte d’Ivoire ; le deuxième défi, c’est la transformation structurelle de l’économie ivoirienne en une économie industrialisée ; le troisième défi, c’est la promotion de la jeunesse et la promotion des femmes ; le quatrième défi, c’est l’amélioration des conditions de vie des Ivoiriens ; et le cinquième défi, c’est « l’Ivoirien nouveau ».

Le chômage est évidemment l’une des plus grandes inquiétudes des jeunes Ivoiriens notamment. Comment est-ce que vous entendez aborder ce problème ?

Je veux d’abord dire que le taux de chômage officiel, tel que mesuré par les systèmes des Nations unies, est autour de 6,9 %, 7%. C’est beaucoup, mais à côté de ce chômage dit officiel, la Côte d’Ivoire a fait une mesure plus pragmatique qui prend ceux qui sont autour du Smig en Côte d’Ivoire. Et à ce moment-là, vous avez des taux beaucoup plus élevés autour de 20%. Il faut faire en sorte que pour les jeunes dont vous parlez, qu’ils trouvent du travail à la fois au niveau du secteur agricole, qui est un secteur important, qui crée 2 millions 400 mille emplois, mais aussi dans le secteur privé. Et les 20%, il faut les amener à l’auto emploi, qui est un élément très fort. A ce titre, le gouvernement a mis en place avec un ministère en charge de la Promotion de la jeunesse et du service civique, et ensuite on a mis en place une agence chargée de l’emploi jeune avec les financements qui accompagnent, financements nationaux comme le financement des partenaires extérieurs. Je voudrais aussi souligner qu’il faut faire en sorte qu’il y ait l’adaptation entre la formation et l’emploi parce que c’est de là que viennent la plupart des distorsions, on faisait des offres d’emploi sans réponse adaptée.

Donc un travail sur le secteur éducatif également de formation, pour que la formation soit adaptée au marché de l’emploi ?

Totalement exact. D’abord au niveau de la mise en place des ministères, de l’Enseignement technique et de la formation professionnelle, avec la construction déjà décidée par le gouvernement de 11 lycées techniques et professionnels, mais aussi la professionnalisation des universités. Nous avons 5 universités qui existent actuellement en Côte d’Ivoire, le président de la République a décidé de la création de trois nouvelles universités, mais il faut que ces universités ne soient des universités généralistes seulement. Il faut les spécialiser en fonction des besoins de la Côte d’Ivoire. Mais je voulais quand même noter que dans l’éducation, le président de la République a décidé de la scolarisation pour tous, il a commencé dès 2015, parce que nous estimons en Côte d’Ivoire que la vraie richesse du pays, ce sont les ressources humaines.

Un sujet a émergé en Côte d’Ivoire, un triste sujet le terrorisme, est-ce que cela a un impact sur l’économie ivoirienne ? Et comment vous entendez pallier aux éventuelles inquiétudes ?

Il y a le terrorisme à Bruxelles, il y a le terrorisme à Paris, mais le monde continue parce que nous sommes dans un monde de violences qui est dû à l’insécurité dans un certain nombre de régions du monde, notamment en Libye, en Irak. Il faut se préparer à ce genre de situation. Nous avons tiré donc les expériences de ce qui est arrivé à Grand-Bassam [fusillade qui a eu lieu le 13 mars 2016 dans un quartier touristique de la ville], l’Etat a décidé d’investir 4 milliards de francs CFA [environ 6 millions d’euros]. Ce que je note d’ailleurs, c’est que malgré cette attaque, le nombre des touristes ne fait qu’augmenter. Aucune réunion internationale à Abidjan n’a été supprimée. Bien au contraire.

Un secteur important de l’économie ivoirienne, évidemment c’est le cacao. La récolte, notamment la première récolte, semble moyenne ou médiocre parfois. Est-ce que vous avez des projets qui sont à même de rassurer les producteurs ?

Habituellement quand la récolte n’est pas très forte, il y a l’augmentation des prix. Le producteur doit s’attendre, lui, à des prix peut-être plus élevés. Quoi qu’il en soit, ce qui est important, la Côte d’Ivoire produit actuellement entre 1,7, 1,8 millions de tonnes. Nous sommes le premier producteur mondial de cacao avec une part disons de 40%. Et ce qui est important, c’est que nous avons amélioré la qualité du fait de la décision de faire en sorte que le prix au producteur soit lié au prix international. 60% du prix international est reversé au monde paysan. L’autre objectif qui est important à souligner, c’est la transformation de ce cacao, que nous souhaitons être plus forte au niveau local. On transforme actuellement 33% de ce cacao localement. C’est l’une des raisons pour laquelle on va rencontrer le secteur privé, à la fois par exemple sur le problème de la transformation du cacao, mais aussi du développement de l’énergie en Côte d’Ivoire. Concernant l’énergie, nous allons passer de 2 000 mégawatts actuellement à 4 000 mégawatts en 2020.

Le climat des affaires est meilleur maintenant en Côte d’Ivoire. Et j’imagine que c’est le message que vous allez adresser aux investisseurs ?

Mais c’est facile de le confirmer puisque la Banque mondiale a classé la Côte d’Ivoire, deux années de suite, parmi les dix meilleurs pays dans le monde ! Les meilleurs pays réformateurs. Je crois que cela dit beaucoup de choses et nous comptons poursuivre ces efforts. Notre objectif, c’est de faire en sorte qu’en 2020, la Côte d’Ivoire soit classée parmi les 50 meilleures économies dans le monde.

Une dernière question plus politique : on parle d’un rapprochement, voire d’une unification du Rassemblement des républicains (RDR) et du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI). Où en est ce projet ?

En fait, ça ne concerne pas seulement le RDR et le PDCI. Ça concerne cinq partis politiques. Il faut ajouter à ceux dont vous avez parlés : l’UDPCI [Union pour la démocratie et pour la paix en Côte d’Ivoire], le MFA [Mouvement des forces d’avenir] et l’UPCI [Union pour la Côte d’Ivoire]. L’objectif final est de faire en sorte que ces partis apparaissent comme des partis unifiés. Ça permettrait d’assurer de nouveau la stabilité politique en Côte d’Ivoire et faire en sorte que, comme ça s’est passé aux dernières élections, que l’ensemble RHDP [Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix] remporte les élections futures. Les élections présidentielles dernières du président Ouattara, appuyé par les cinq partis, a obtenu 83,66%. C’est tout dire.

Léonard Vincent

Rfi.fr

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