Affrontements récurrents entre populations et forces de l’ordre / Les effets collatéraux néfastes du racket et des bavures

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Affrontements interethniques entre populations de mêmes villages ou de localités voisines par-ci, affrontements populations et forces de l’ordre par-là. Ce sont ces scènes d’une autre époque qu’il est donné d’assister en ce 21ème siècle, dans plusieurs localités ivoiriennes. Comme un effet de mode. Malheureusement, ces altercations sont souvent si violentes qu’elles se soldent la plupart du temps, par mort d’hommes. Le village de Niamoin, à 45 km de Bouna, au Nord-est et la ville de Yamoussoukro, capitale politique, sont les derniers exemples de théâtre d’affrontements violents où au moins, cinq (05) personnes ont perdu la vie avec des dégâts matériels importants. A Bouna, ce sont deux jeunes gendarmes, Yao Maxime et Ouattara Mamadou, fraichement mutés à leur poste et un élément des FACI, qui ne serviront plus le drapeau ivoirien, selon la volonté d’une justice populaire d’un autre âge. Avec eux, deux civiles, un paysan qui ne plantera plus d’igname et d’anacarde ainsi qu’un jeune couturier de Yamoussoukro qui ne s’assoira plus derrière sa machine à coudre pour confectionner des vêtements. Il est vrai, la Côte d’Ivoire sort d’une longue et profonde crise qui s’est terminée par des affrontements armés très violents. Nombreux sont les habitants de ce pays qui se sont habitués à voir autour d’eux, le sang et la mort. Malgré la volonté du gouvernement de récupérer les armes des mains des civils qui n’y ont pas droit, beaucoup de ces armes de guerre circulent encore. Et elles sont sorties parfois pour semer la désolation. Affrontements, pertes en vie et dégâts matériels La liste des villes ivoiriennes où les populations se sont affrontées entre elles et où les forces de l’ordre ont été victimes d’agression des populations est longue et ne fait que s’allonger. Souvenons-nous de Katiola (Centre-nord de la Côte d’Ivoire), en octobre dernier (lundi 3 et mardi 04), un policier porté disparu, quatre gendarmes et un enfant blessés dans des violences survenues après la mort d’un jeune homme, Yaya Sokoba 25 ans, tué par la police, après l’avoir « blessé puis achevé, sans raison apparente ». Le commissariat de police, le domicile d’un officier de police, plusieurs véhicules et des dizaines de motos avaient été incendiés. Tout le personnel du commissariat de Katiola avait été muté. A Bouna (nord-est de la Côte d’Ivoire), en mars dernier (mercredi 23 au jeudi 24), après deux jours d’affrontements au cours d’un conflit entre agriculteurs Lobi et éleveurs Peulh. Il a été fait cas de 17 à 19 morts et 30 blessés dont cinq agents des forces de l’ordre. A Korhogo (Nord de la Côte d’Ivoire), le 20 juillet dernier, au cours des manifestations contre la Compagnie ivoirienne d’électricité, la police qui voulait sécuriser les lieux, a essuyé le lancer de jets de pierres d’une foule très remontée. Une population qui n’est pas en de bons termes avec sa police, pour la simple application des mesures sur le port des casques. La liste est longue en tournant un regard panoramique vers Duékoué, Daloa, Bouaké et d’autres localités. Sentiment d’insécurité généralisée, défiance à l’autorité public et propension à se faire justice.

De nombreuses raisons peuvent expliquer cet état de fait. « Nul n’est sensé ignorer la loi », dit-on. Mais en réalité, quel est le pourcentage de la population ivoirienne qui est sensé ‘’ne pas ignorer la loi’’ ? Diverses raisons sont évoquées :

« La relation que la police entretient avec les populations est l’une des premières raisons et doit être revue. Elle est faite au jour le jour d’actes frustrants envers cette population qui en retour, utilise des opportunités de mouvements sociaux pour s’exprimer violemment. Les forces de l’ordre (police, gendarme, FACI, douane, Eaux et Forêts) se présentent à la population, en tant que représentant de la loi et de la force et non en défenseur de cette population ».

« Au cours des rafles, comme si les raflés étaient accusés de quoi que ce soit, ils sont mis parfois torse nu, assis à même le bitume ou défilent en file indienne, avec toute dignité bafouée. Les forces de l’ordre, imbue de leur force, se permettent de porter main au citoyen à la moindre contradiction, allant même jusqu’à faire faire usage de leurs armes ». A ces récriminations, s’ajoutent le racket, selon ceux qui acceptent de donner leurs avis. « Sinon, qu’est ce qui explique le zèle de ces corps habillés, à utiliser avec ‘’joie et dévouement’’, leurs propres véhicules pour les missions étatiques, là où d’autres fonctionnaires attendent les véhicules de liaison mis à leur disposition ? ».

Morceaux choisis. « De la capitale Abidjan aux villes de l’intérieur jusque dans les campements les plus reculés, à bord de leurs propres voitures, on peut apercevoir les corps habillés (police, gendarmerie, FACI, douane, Eaux et Forêt), au travail. Qui leur paie le carburant qu’ils utilisent chaque jour pour accomplir leur mission et qui entretient leurs véhicules ? Le racket, bien sûr », affirme cet autre. « C’est lorsque le racketteur et le racketté se s’entendent pas, qu’arrivent la plupart du temps, les bavures », conclu-t-il.

Pour toutes ces raisons, faut-il défier l’ordre public et se faire justice ? La réponse est non ! Il faut plutôt sensibiliser sur les effets nocifs du racket, des bavures policières, des abus et de la corruption. Lorsque cela portera, c’est la population elle-même qui collaborera avec sa police, partant, tous les corps habillés et les protégera. La population comprendra qu’on ne tue pas parce qu’on est racketté, qu’on tue parce que tuer est un jeu, un loisir. Que tuer est un acte répréhensible condamnable et condamné par la loi. Le racket est un fléau, les tueries sont de la barbarie et cela ne peut être toléré dans un Etat de droit comme la Côte d’Ivoire. Au cours d’une sortie, le Ministre de l’Intérieur, Hamed Bakayoko a demandé aux chefs de corps de « sensibiliser nos hommes de sorte que leurs relations avec les populations s’améliorent, pour que la confiance revienne rapidement entre nos forces de défense et de sécurité et les populations ».

Un Etat fort

Il faut revoir le contrat entre notre police nationale en particulier, les forces armées en général et la population. Quel type d’État voulons-nous ? Il faut restaurer la puissance de la force publique. Ce n’est plus normal et admissible que des populations s’attaquent à un symbole de l’État comme les commissariats et camps des forces de l’ordre. A aller jusqu’à tuer des forces de l’ordre en se faisant justice soi-même. Cela doit être sévèrement puni et de façon inoubliable. L’État doit vivement prendre ses responsabilités, diligenter une enquête de sorte à arrêter toutes les personnes impliquées dans ces meurtres, situer leurs responsabilités et les condamner sans état d’âme. Ces Assassinats ne doivent pas rester impunis. Aucun individu fut-il puissant, ne doit se rendre justice, surtout, face aux forces de l’ordre. Les forces de l’ordre sont et demeurent le socle sur lequel repose la cohésion et la stabilité de la société. Une chose est cependant sûre, un état fort, c’est un état qui a des forces régaliennes fortes. En l’absence de ce paramètre, l’État devient une entité molle susceptible de s’écrouler au moindre soubresaut. Ce qui n’est le souhait de personne. C’est le lieu de mettre à contribution, les députés, ces élus du peuple. Dans leur mission de sensibilisation de la population, ils ne doivent pas se limiter seulement aux salles de réunion et centres culturels des villes mais ils doivent visiter les villages et les gros campements.

Par un communiqué, le Gouvernement a déploré et « condamne ces événements, les pertes en vies humaines qui en ont résulté et présente ses condoléances aux familles de toutes les victimes. C’est l’occasion de rappeler que chaque fois que des incidents ont mis en cause des éléments des forces de l’ordre, le Gouvernement a promptement réagi et pris des sanctions et mesures conséquentes. Il est cependant inacceptable que des violences soient exercées à l’encontre des forces de défense et de sécurité. Le Gouvernement exercera la plus grande fermeté à l’encontre de tous ceux qui s’attaqueront à leur intégrité physique et qui dégraderont leurs équipements ou leur lieu de travail. Nul n’a le droit de se faire justice. Une enquête est ouverte et les auteurs de ces violences seront arrêtés et traduits devant les tribunaux ».

Khalil Ben Sory

Lementor.net

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