Révélations sur 18 années de vol à la mairie du Plateau

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Des documents comptables tout à fait authentiques montrent que la mairie du Plateau a été l’objet d’une gestion opaque durant de nombreuses années. En atteste le recouvrement des créances de publicité entre 2012 et 2017.

Jusqu’à l’arrivée du maire intérimaire, monsieur Jacques Yapi, les recouvrements à la mairie du Plateau étaient l’affaire d’une société privée du nom de négociation communication, en abrégé NEG-COM. Cette société a été créée le 15 juillet 2002 par monsieur Jacques Ehouo qui en est l’unique actionnaire.

Pour ceux qui veulent pousser leur curiosité, monsieur Ehouo est le neveu de Noël Akossi Bendjo, l’ancien maire débarqué pour détournement massif de deniers publics ; il est depuis quelques semaines le candidat du PDCI à l’élection municipale. Avant cela, Jacques Ehouo est député du Plateau et surtout l’homme qui recouvre toutes les créances et taxes de la mairie.

NEG-COM, une société sans expertise avérée

C’est en février 2002 qu’il obtient ce contrat d’exclusivité qui le lie à la mairie du Plateau. Avant cette offre, NEG-COM n’a pas le passé d’une société ayant fait ses preuves dans le secteur du recouvrement. Elle n’a que deux ans d’existence d’ailleurs lorsque le contrat lui est offert et est donc très peu expérimentée au moment de commencer à exécuter ce contrat. Et pour ne rien arranger, son patron, Jacques Ehouo, a fait des études de biochimie au Canada, très loin de la communication et du recouvrement.

Alors pourquoi lui a-t-on donné ce contrat d’exclusivité ? Deux hypothèses peuvent l’expliquer. Soit parce que monsieur Ehouo est le neveu de Nöel Akossi Bendjo, l’oncle voulant coûte que coûte trouver du travail à son neveu ; soit monsieur Ehouo agit en sous-main pour le compte de Bendjo lui-même. Soit les deux hypothèses à la fois. Toujours est-il qu’au terme du protocole d’accord, NEG-COM se voit récompensée d’une ristourne de 30% des sommes recouvrées, la mairie empochant les 70% restants.

Une pratique pourtant interdite par la loi

Pour les finances de la commune, c’est la double peine. Car au terme de l’article 160 de la loi numéro 2003-489 du 26 décembre 2003 portant régime financier, fiscal et domanial des collectivités territoriales, le recouvrement des taxes communales est assuré par le trésorier municipal, pas la mairie, encore moins une société privée. Le sachant, les mairies mettent généralement à la disposition du trésorier municipal une partie de leur personnel afin de l’aider dans sa tâche. Pas plus. Or au Plateau, non seulement ce n’est pas le trésorier municipal qui recouvre mais un privé. Alors, ce qui devait arriver arriva.

Un système vol organisé

En effet, les prévisions de recettes publicitaires ont généralement tourné autour de 35 millions que la société NEG-COM a toujours eu du mal à atteindre. Selon les pièces comptables dont nous avons reçu copie, entre 2012 et 2015, les prévisions de recettes ont stagné à 35 millions fcfa annuelles pour des raisons que la période ne permet pas de fournir d’emblée. Mais le pire reste à venir. Car sur les 35 millions de prévisions annuelles, seuls 7.842.000 fcfa ont été recouvrés en 2012 ; 8.022.000 fcfa en 2013 ; 26.007.100 fcfa en 2014 et 28.125.325 fcfa en 2015. En 2016, Neg-com récolte alors au centime près les 42.016.650 de prévision et un peu plus de 40 millions en 2017.

Sauf qu’en quatre jours, après la destitution du maire Bendjo, la nouvelle municipalité a récolté plus de 40 millions au titre des créances de publicité. Pourquoi la mairie s’est-elle donc coltinée depuis 2002, une société privée qui n’arrivait pas à maximiser ses gains et qui faisait du sur-place ? Et pourquoi le conseil municipal a-t-il, pendant tout ce temps, été tenu à l’écart de la vie de cette entreprise même lorsque parfois un conseiller exaspéré demandait à regarder de plus près la convention qui oblige la mairie à lier son destin à NEG-COM ? La réponse est sans aucun doute dans les millions qui se sont évaporés des comptes de la commune depuis tout ce temps. Selon des bilans encore parcellaires, et rien que sur cette période ci-dessus évoquée, en moyenne 51 milliards ont été volés à travers divers circuits de détournements, rien pour ce qui est uniquement des créances de taxes de publicité.

Des milliards volés sur la conscience

Déjà le 8 juillet 2009, Jean Séa Honoré, conseiller municipal au Plateau, tentait d’attirer l’attention sur cette opacité. Il écrivait au maire Akossi Bendjo cette supplique : « j’ai l’honneur de vous rappeler que pour en savoir davantage sur les malversations dont vous êtes à tort ou à raison accusé ces derniers temps, j’ai, à la date du 8 juillet, sollicité auprès de vous, la communication de certains documents ». Mais il n’aura aucune réponse.

Le conseiller municipal qu’il est à cette époque espérait pourtant se voir expliquer « les contrats en vertu desquels les sociétés NEG-COM et CIVES procèdent respectivement au recouvrement des recettes publicitaires et celles afférentes aux occupations du domaine public et sabots ». En pure perte. Du moins parce que la société de Jacques Ehouo avait tant de choses à se reprocher.

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