« Alassane Ouattara, bâtisseur de la Côte d’Ivoire moderne et émergente « 

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Si d’aventure, l’on posait la question « pourquoi sommes-nous dans cette salle ?», la réponse, de toute évidence, serait : nous y sommes en vue d’un Colloque dont le thème est : « Alassane Ouattara, bâtisseur de la Côte d’Ivoire moderne et émergente ». Cette réponse, à son tour, questionne : pourquoi un Colloque sur un tel thème, déterminé, précis, aux contours brillant de l’éclat du flamboyant ? Pourquoi, cela veut dire : de quel fondement ce Colloque surgit-il et vers quel fondement se dirige-t-il ? Ne sommes-nous pas ici rassemblés parce que nous avons le sentiment que si nous nous taisons, comme le dit le Christ, les pierres crieront à notre place ? HEGEL souligne qu’un grand homme condamne les humains à l’expliquer ! Expliquer ici consistera pour moi à montrer en quel sens le Président Alassane Ouattara, pierre d’abord rejetée par les bâtisseurs, est devenu une pierre non seulement angulaire, mais vivante, étincelante, poursuivant son chemin en façonnant, en bâtissant, afin d’assurer à notre pays une stabilité rayonnante, en le rendant visible aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur de lui-même, en l’ouvrant sur d’autres nations, dans le souci d’une fraternité universelle.Un regard, même furtif, sur l’histoire récente de notre pays révèle que nous venons de loin ! En effet, les choses se sont obscurcies à un point tel que notre pays risquait, de manière soudaine, de glisser vers l’abîme, hors de l’horizon conférant à l’aventure d’un peuple le visage de l’humain. Ne suffit-il pas de penser, pendant la crise que nous avons traversée, à tous ces hommes et ces femmes atrocement tués par leurs semblables, pour une raison que nulle raison ne saurait justifier ? Pareille circonstance relève de ce que JEAN-LUC MARION appelle, à juste titre, un phénomène saturé, c’est-à-dire une réalité qui ne se peut comprendre par simple causalité, dont nulle cause déterminée ne saurait rendre raison ! Tout ne se passait-il pas en effet comme si la partie ténébreuse de notre âme, déchainée, s’exerçait à nous enfermer, de manière fort dommageable, dans une existence tout à fait laide ? Pour que tout dans notre pays ne s’abîme pas radicalement, il a fallu que vienne se tenir là, au milieu, un homme. Il est venu se tenir là , en cet espace absolu de la médiation où les choses germent dans le silence, avant de s’offrir à la lumière du jour. Il est venu se présenter là, au milieu, en ce lieu sans lieu de rassemblement du divers de la chose publique, où le pain est librement proposé afin d’être simplement rompu et partagé.Dans la vie des peuples, en temps de détresse, la bienveillance amicale du destin parvient à susciter la venue d’un grand homme pour préparer une aube nouvelle, pour que renaisse le printemps de la vie. Ainsi que le montrent les textes sacrés des grandes religions, le destin accomplit ce geste, surtout quand il s’agit d’un pays hébergeant sur son sol une population nombreuse venue d’ailleurs, en quête d’une terre d’hospitalité et d’espérance.Le rôle de l’œil est de voir, comme celui de l’oreille est d’entendre. Si nous acceptons de les ouvrir pour voir et entendre, nous pouvons, sans aucune difficulté , voir et entendre dire ceci : notre pays, la Côte d’Ivoire, se trouve à un moment particulièrement important de sa vie historique. Il a renoué, en la portant encore plus loin et plus haut, avec une tradition qui l’a aidé à briller en myriades de scintillations en Afrique et dans le monde. La Côte d’Ivoire brille en bâtissant et en accueillant, elle brille en construisant et en s’ouvrant, elle brille en créant et en offrant en partage. Le Président Alassane Ouattara ne reprend-il pas une tradition initiée par le Président Félix Houphouët Boigny, en la déployant avec force, sagesse et beauté ? Il sait que les fondations de la maison sont déjà là, établies par le premier bâtisseur de notre pays et que la tâche consiste à les sauvegarder et à les consolider. Chaque travail que nous effectuons est un coup de marteau de plus que nous portons sur du fer qu’un autre a forgé avant nous, et avec lequel un autre, après nous, labourera la glèbe . L’homme ne se satisfait pas d’être là dans l’espace et dans le temps, comme les autres réalités du monde. Un morceau de pierre que je déplace se contente d’être là, à sa nouvelle place. Il n’éprouve nullement le moindre désir de se retrouver autrement. L’homme, au contraire, veut se retrouver soi-même. Dans le temps qui passe et l’espace s’étendant là devant lui, il veut se sentir chez soi, inscrire son propre temps et son propre espace. Pour tout dire, L’HOMME HABITE. De tous les êtres, n’est-il pas le seul à être en capacité d’habiter ? Comme le souligne Martin HEIDEGGER, « habiter est la façon d’être authentique dans l’espace, adéquate à l’homme » (das Wohnen ist die echte, dem Menschen angemessene Befindlichkeit im Raum).L’homme ne veut pas habiter de n’importe quelle manière. Il imagine, conçoit, se représente son habitation. IL HABITE EN BATISSANT. Bâtir : nous tenons ici notre mot ! Le tenant, ne nous faut-il pas chercher à séjourner en lui ? Qu’est-ce que bâtir sinon ouvrager, façonner, donner corps dans l’extériorité ? C’est travailler à laisser surgir à l’extérieur ce qui vient de l’intérieur. Celui qui bâtit est soucieux de laisser subsister quelque chose. Dans le temps qui sans cesse fuit, il veut lancer un défi au contingent, à l’éphémère ; il veut maintenir une réalité dans l’ordre de la permanence. Le bâtisseur ne veut pas ce qui ressemble à une hutte branlante de gardien de vigne, mais ce qui est appelé à s’enraciner dans la longue durée ! Tandis que les autres produisent pour immédiatement consommer dans la frénésie d’une jouissance stérile, sans lendemain, il imagine, crée et offre.Il est des gestes qui ne trompent pas, car ils suffisent d’eux-mêmes à révéler ce qu’est un bâtisseur. Qui veut bâtir ne prend-il pas d’abord le temps de regarder, d’observer, de scruter ? Comme le médecin, il sait que le bistouri doit s’appliquer là où l’enflure a établi son règne, afin de se nommer guérison. Le Président Alassane Ouattara a pris le temps d’observer l’état dans lequel se trouve la Côte d’Ivoire, quand il fut nommé Premier Ministre par le Président Félix Houphouët Boigny. Il a été conduit à une évidence que nous révèle la nature. En bonne pédagogue, la nature nous enseigne ceci : c’est une fois assurées la profondeur des racines et la verticalité du tronc que l’arbre peut étendre ses branches pour laisser être des fleurs et des fruits. Comment assurer la profondeur des racines et la verticalité du tronc ? Après une crise ayant affecté le souffle de toute une société pour la défigurer de part en part, ne convenait-il pas, avant tout, de se soucier d’offrir des infrastructures routières et des lieux de savoir ? C’est à cela que s’est engagé le Président Alassane Ouattara. Comme Archimède, il s’est donné un point d’appui pour soulever notre pays. Les routes permettent d’aller d’un lieu à un autre. De cette façon, elles aident à surmonter l’obstacle naturel, à rendre proche le lointain, à rencontrer d’autres hommes appartenant à diverses communautés et ethnies. Elles favorisent la circulation des biens, et se révèlent ainsi comme la clé même de toute économie. Le pont Henri Konan Bédié ne concentre-t-il pas en soi, pour le répandre, le doux parfum de l’œuvre poursuivie à travers la construction de ce qui relie, relaie, tisse et scelle des liens ? Reliant de grandes rives, favorisant une circulation beaucoup plus fluide, surgissant comme le troisième terme qui opère la synthèse de deux autres ponts, ce pont est le lieu de l’unité, le point de l’émergence vers l’essentiel, vers ce qui ne rétrécit pas, mais élargit, ce qui n’obscurcit pas mais éclaire, ce qui n’enchaine pas à l’immédiateté de nos terres, mais libère et invite, par sa sublime beauté, à nous envoler en vue d’une communion avec le monde. Ne convient-il pas de dire que ce pont est venu à son heure ? Longtemps attendu, il vient signifier qu’à la pointe de toutes les activités conduisant le monde, se trouvent des hommes dont la personnalité anime la substance des choses en vue de leur réalisation effective. En passant sur ce pont, n’éprouvons-nous pas de la joie et de la fierté ? Ne nous représentons-nous pas ce que pourrait devenir notre pays, si le processus engagé se poursuivait avec la même détermination ? La question ne manque pas de surgir : Pourquoi chercher à se déplacer d’un endroit à un autre ? Pourquoi produire des richesses, échanger des biens, aller vers l’autre ? L’université est le lieu où sont posées ces grandes questions. En elle, viennent s’exposer et s’approfondir les savoirs en leur totalité organique. Elle est le milieu révélant l’homme à lui-même, dans sa soif de la vérité comme ce qui libère. Sanctuaire de revitalisation de la connaissance, et donc de la société qu’elle est appelée à féconder de son utopie, l’université exprime que toute la dignité de l’homme consiste dans la pensée, selon le mot de Pascal. Elle exprime que l’homme n’est pas le pain qu’il mange, et qu’il est en dette de porter la vue plus loin, en s’ouvrant à l’Universel. Universel veut dire ce qui, un en soi, verse pourtant dans tous les sens. Le commerce avec le savoir conduit à m’éveiller à un lieu qui n’est ni à moi, ni aux autres, mais s’étend simplement là entre nous, au milieu, en pure gratuité. En ce lieu, il est permis à chacun de se retirer pour se rejoindre et rejoindre les autres, dans une amitié courtoise, dans une co-appartenance au même. Le Sage nous apprend que l’oiseau spirituel a deux ailes , et si tu n’en fais battre qu’une, tu tombes ! Routes et Universités, ponts et Ecoles, dans leur articulation, ne renvoient-ils pas symboliquement aux deux ailes de l’oiseau, au corps et à l’esprit, à l’espace et au temps, à l’extérieur et à l’intérieur ? De cette façon, le Président Alassane Ouattara est soucieux de l’unité profonde de l’homme. Une personne conduisant son action à la lueur d’un tel symbolisme, ne cherche-t-elle pas à répondre à l’appel des cimes ? Routes, ponts, universités et écoles ayant assuré l’assise, les colonnes du pays peuvent désormais, par leur médiation, se tenir en toute verticalité pour le faire briller. Se tenir verticalement, n’est-ce pas se tourner vers le Bien ? Le Bien cherche à briller et à se diffuser. Platon disait que « le bien n’est jamais jaloux de quoi que ce soit ; libre de toute jalousie, il voulut que tout lui ressemblât autant que possible ». De cette façon, n’est-il pas en soi PUISSANCE D’EMERGENCE ? Emerger dit un acte : celui de faire irruption, de surgir, de paraître hors de soi à la suite d’une patiente maturation. C’est s’éveiller à un niveau proprement accomplissant. BERGSON souligne qu’exister consiste à changer, changer à se mûrir, se murir à se créer infiniment. Se créer infiniment, qu’est-ce, sinon jaillir sans cesse hors de soi, être en variation de soi dans sa propre durée ? En un mot, c’est devenir en puisant sans cesse en soi comme en un réservoir de vie. La passion du Bien, de l’intérêt général me parait conférer à l’œuvre du Président Alassane Ouattara sa signature intrinsèque. Ici, peut se lire une vue haute et noble de la politique saisie comme une manière d’être au service des autres, en s’engageant ni pour le jour qui passe, ni pour le jour qui, demain , vient, mais pour ce qui ne cesse de survenir : l’ouvert de l’avenir, radieux, irradiant à l’image d’un axe de diamant. Une société qui n’a pas d’avenir à se mettre sous la dent ne pourra que tourner en rond. Ne trouvant rien, ne sera-t-elle pas condamnée à dévorer son propre présent jusqu’à se dévorer soi-même ?Pour ne pas avoir à se dévorer, la Côte d’Ivoire est invitée, sous la gouvernance du Président Alassane Ouattara, à penser grand, en se détournant d’un patriotisme instinctif, sans concept, fait de la bouillie du cœur, oubliant que la République, en tant que la communauté des hommes raisonnables, est une manière de se tenir dans l’ouvert en apprenant tout simplement à devenir ami de l’homme, quel qu’il soit. Comme le Président Félix Houphouët Boigny, le Président Alassane Ouattara est soucieux de conduire la Côte d’Ivoire, en ayant pour équerre et pour compas une parole sacrée soufflée à Moïse dans un passage du Lévitique dans l’Ancien Testament : « Quand vous moissonnerez, vous ne couperez pas les épis qui ont poussé en bordure de vos champs, et vous ne retournerez pas ramasser les épis oubliés. Vous ne passerez pas non plus dans vos vignes pour ramasser les grappes oubliées ou les grains tombés à terre. Vous les laisserez pour les pauvres et pour les étrangers ».Se soucier du pauvre, de l’étranger, de la veuve et de l’orphelin, c’est se soucier d’être une demeure pour ce qui est fragile, faible et vulnérable. C’est vouloir nourrir de son jeûne la faim de l’autre homme. Construire des hôpitaux ne participe-t-il pas d’un tel souci ? L’hôpital abrite dans la cité une parole autour de la dignité, de l’altérité et de la responsabilité. Il est le lieu qui, en un éclair, dans le silence, me rappelle qu’il existe, au matériel comme au moral, une cote en dessous de laquelle je ne puis tolérer que vive un être humain . Une telle orientation me semble signifier que l’on a compris ceci : nous sommes les rameaux de la même vigne, la vigne de la vie . Celle-ci nous invite à apprendre à frapper une médaille avec un or étranger, à « Forger, unis dans une foi nouvelle, la patrie de la vraie fraternité ».Fraternité ! Nous tenons ici un mot qui n’est pas un mot comme tel, qui est au-delà de tout mot. Dans Eupalinos, Paul VALERY fera dire à l’architecte : « A force de construire, je crois bien que je me suis construit moi-même ». En construisant, en bâtissant, n’est-ce pas l’homme qui se construit, se bâtit ? Qu’est-ce qui, au fond ,cherche à être bâti, sinon l’idée de la fraternité ? La fraternité n’est-elle pas essentiellement la chose qu’il importe de construire ? Elle seule FAIT SENS dans l’histoire. Il convient de la considérer comme l’astre, l’étoile servant de visée à l’action politique. Là où la fraternité n’est pas un souci, l’aventure historique manque de sens. Nous tournons en rond. Nous nous épuisons à piétiner. N’est-ce pas alors le désastre ? Dés-astre est ce que le mot lui-même indique : la perte de l’astre, la perte de l’étoile. Le bâtisseur a appris à marcher en se laissant orienter par une étoile. Il a appris à marcher en posant le pied droit devant soi. Le pied droit est le pied de la droiture imposant toute loi à notre corps, à nos sens pour rectifier ce qui est courbe et nous tenir en toute verticalité sur le chemin. Le chemin ne finit pas. Plus on avance, plus la route s’ouvre devant nos yeux. Le bâtisseur, lui, s’attache à poursuivre son chemin avec noblesse, sagesse et élégance, sous le regard et la protection du ciel.Permettez, Mesdames et Messieurs, que ce mot CIEL soit le dernier mot d’une parole simplement proposée afin d’être, comme le pain, rompue et partagée !

Auteur : "Professeur Kouadio Augustin Dibi.

Source : "Professeur Kouadio Augustin Dibi.

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