Retour à La Normalité Au Pays De Soundjata – Comment Ouattara a Sauvé Le Mali

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Certains croyaient à un pari fou au départ. D’autres à un coup de bluff. Et pourtant, à l’arrivée, il s’est avéré être un coup de maitre. Mieux, il a permis au Mali de renouer avec la légalité constitutionnelle et institutionnelle. Lorsque le président en exercice de la CEDEAO, Alassane Ouattara, annonçait que le premier tour de l’élection présidentielle au Mali se tiendrait le 28 juillet 2013, nombreux sont ce qui l’ont accusé de vouloir conduire ce pays vers la catastrophe. Leur argumentaire favori était qu’il était très risqué de l’envisager après le profond traumatisme qu’ont vécu les habitants du Nord du Mali à la suite de l’invasion djihadiste, de janvier 2012 à janvier 2013, début de l’intervention militaire de la France au nord du Mali. La reconquête se fait en un temps record. En trois mois, sous l’impulsion de l’armée française et des troupes tchadiennes appuyées par l’armée malienne, les villes de Gao et Tombouctou sont reconquises. La ville de Kidal reste pour autant sous l’influence des Touareg du MNLA (Mouvement national de Libération de l’Azawad). Pour certains nationalistes et hommes politiques à Bamako, il n’est pas question qu’il y ait des élections pendant que Kidal est encore sous le contrôle du MNLA. Mais sous la houlette du président en exercice de la CEDEAO, plusieurs sommets sont organisés à Abidjan et à Yamoussoukro pour sortir le Mali de l’instabilité. Notamment, celui du 27 mars 2012 à Abidjan et celui du 28 juin 2012 à Yamoussoukro. Grâce aux efforts du président Alassane Ouattara, la communauté internationale se mobilise autour du gouvernement du président Dioncounda Traoré, le président par intérim. Après avoir ramené les putschistes de Kati dans leur caserne, le président Ouattara s’attèle à restaurer avec la France et les autres Etats de la CEDEAO l’autorité du président par intérim. Au dernier sommet de la CEDEAO à Abidjan, le ministre des Affaire étrangères, Laurent Fabius, s’adresse ainsi au président malien : « Président Dioucounda Traoré, vous êtes le chef suprême des armées et à ce titre prenez vos responsabilités ». Le volet politique et institutionnel réglé, reste le volet financier pour la restauration de l’autorité de l’Etat malien. Le président Ouattara ici encore prend son bâton de pèlerin et parcours les capitales africaines et l’Europe pour trouver les fonds nécessaires pour non seulement la prise en charge des troupes africaines en mission au Mali et pour les élections. A son initiative, le sommet de l’Union africaine à Addis-Abeba permet de recueillir les fonds pour venir en aide au peuple malien à la recherche de son intégrité territoriale et de sa stabilité perdue. La France également lui emboite le pas. Sous l’instigation de l’ancienne puissance coloniale, la communauté internationale engage un soutien financier important pour la reconstruction du Mali, de son armée et de l’administration ainsi que des services publics détruits au Nord du pays, et demande au Mali d’organiser pour le mois de juillet 2013 au plus tard, une élection présidentielle permettant de clôturer la transition politique. Malgré les difficultés (insécurité persistante au Nord, région de Kidal toujours sous contrôle du MNLA, nombre important de déplacés et de réfugiés) et face à la pression de la France et de la communauté internationale, le gouvernement accepte cette demande. Les négociations entre les autorités maliennes et le MNLA reprennent sous la médiation du président burkinabé Blaise Compaoré (médiateur dans la crise malienne pour le compte de la CEDEAO) afin de permettre le cantonnement puis le désarmement des groupes armés. Le retour de l’armée et de l’administration malienne et la tenue des élections sur l’ensemble du territoire malien, y compris Kidal. Une loi électorale est adoptée le 27 mai 2013 en Conseil des ministres. Elle prévoit le premier tour de l’élection présidentielle le 28 juillet 2013 et éventuellement un second tour pour le 11 août 2013. Le 8 juillet, Tiébilé Dramé demande un report du scrutin à la Cour constitutionnelle, considérant qu’il y a violation de la loi électorale, le collège électoral ne pouvant être convoqué tant que les listes électorales ne sont pas établies sur l’ensemble du territoire national. Ce qui serait le cas dans les 13 communes de la région de Kidal. Le 17 juillet, au cours d’une conférence de presse, il déclare retirer sa candidature « parce que les conditions d’une élection régulière ne sont pas réunies ». Au cours du 43ème sommet de la CEDEAO à Abuja le 17 juillet dernier, les chefs d’Etat avaient rappelé que la date du 28 juillet était impératif. Le lendemain au Togo, le président en exercice, le Président de la République de Côte d’Ivoire avait réitéré sa foi de voir le scrutin présidentiel au Mali se tenir à cette date.
Le premier tour se déroule le 28 juillet dans le calme malgré de nombreux cafouillages, des électeurs cherchant désespérément leur bureau de vote.
Les observateurs de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) se déclarent satisfait du déroulement du premier tour remarquant cependant la difficulté pour les électeurs à trouver leur bureau de vote ainsi que des dysfonctionnements comme le manque d’isoloirs dans certains bureaux de vote.
La mission d’observation de l’Union africaine, conduite par Edem Kodjo, ancien Premier ministre togolais a constaté « un scrutin homogène malgré quelques petites imperfections, qui cependant n’entachent pas la bonne tenue du scrutin »75.
Catherine Ashton, haute représentante de l’Union européenne, « malgré des conditions difficiles, l’administration malienne a fait preuve de détermination pour garantir la transparence et la crédibilité des élections ». Le président français François Hollande s’est félicité du « bon déroulement du scrutin présidentiel malien, marqué par une mobilisation importante et une absence d’incident majeur ».
Le 2 août les résultats complets provisoires sont annoncés par le ministre de l’Administration territoriale, le colonel Moussa Sinko Coulibaly. Ibrahim Boubacar Keïta arrive largement en tête avec plus de 39,24% des voix devant Soumaïla Cissé qui obtient 19,44% des suffrages exprimés. Le candidat de l’Adéma-Pasj Dramane Dembélé arrive en troisième position avec 9,59% des voix
Prenant acte des résultats provisoires le plaçant deuxième, le Soumaïla Cissé déplore la mauvaise organisation du premier tour en déclarant que « l’arbre de la grande mobilisation du peuple malien, le 28 juillet, ne doit pas cacher la forêt de l’impréparation, de la mauvaise organisation de la fraude qui ont caractérisé le premier tour de l’élection présidentielle » et demande que « ces ratés, ces dysfonctionnements, cette mauvaise organisation dont la responsabilité incombe au seul gouvernement, soient corrigés avant le second tour ».
Le 7 août 2013, la Cour Constitutionnelle a proclamé les résultats définitifs: Ibrahim Boubacar Kéita dit « IBK » arrive en tête avec 39,79% des voix, suivi de Soumaïla Cissé avec 19, 70%. Finalement, au second tour, le 11 août dernier, IBK l’emporte avec 77,6% contre 22,4% pour son challenger Soumaïla Cissé. Avant même la proclamation définitive des résultats le 15 août, Soumaïla Cissé se rend au domicile du vainqueur le 12 août pour féliciter son adversaire pour sa brillante victoire. La sous-région peut pousser un ouf de soulagement. La démocratie malienne vient d’être restaurée. Le Mali vient de loin. Le vendredi dernier, le nouveau président du Mali, Ibrahim Boubacar Kéita accorde une visite au président de la Côte d’Ivoire Alassane Ouattara. Il dit être venu témoigner sa reconnaissance et celle du peuple malien au président en exercice de la CEDEAO qui, pour lui, a sauvé le Mali. Un bel hommage à un infatigable apôtre de la paix qui a décidé de faire de toute l’Afrique de l’Ouest un espace où il fait bon vivre.
Et c’est mérité.

 

 

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