Le Regretté Docteur Benoît Dacoury-Tabley Ou La Mauvaise Conscience Du FPI

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Abidjan, Côte d’Ivoire

Il est des partis politiques qui, tel un boulet à vie, traînent la réputation d’avoir bâti dans la haine, dans le mensonge et dans l’esbroufe, l’essentiel de leur image. Bien qu’ils s’évertuent à se donner par tous sophismes et ruses les atours des anges de lumière, on découvre, à la perfidie et à la malignité de leurs pratiques et de leur idéologie, l’imposture dont tous les tissus de leur être sont cousus. Incapables d’affronter les batailles décisives du développement et de la modernisation des institutions démocratiques, ces partis se réfugient souvent dans une rhétorique victimaire, se désignent des boucs émissaires parmi les étrangers, les apatrides, les pauvres, voire tout simplement les ressortissants de communautés ethniques différentes de celles qui sont majoritaires en leur sein. N’est-ce pas précisément le sort contemporain du Front Populaire Ivoirien, né au cœur des années 80 pour, croyait-on alors, apporter le pluralisme démocratique à la politique ivoirienne ? On doutera difficilement de cette évidence si l’on analyse le déni de réalité et le cynisme froid qui caractérisent l’attitude du Front Populaire Ivoirien envers le meurtre d’un innocent, le regretté Docteur Benoît Dacoury-Tabley, exécuté en 2002 pour punir son frère Louis-André, dont on apprenait alors son engagement au cœur du Mouvement Patriotique de Côte d’Ivoire, contre l’ivoirité et les tragédies abominables qu’elle perpétrait dans le pays depuis la mort de Félix Houphouët-Boigny. On résiste cependant difficilement à l’envie de se poser sérieusement les questions suivantes : 1) Pourquoi le FPI ne s’est-il toujours pas excusé d’un tel crime de sang ? 2) Jusqu’où ira la prétention du FPI à la sainteté en cette période cruciale pour le processus de réconciliation en Côte d’Ivoire ? 3) Que faire, si le FPI s’entête à ne pas demander pardon pour l’assassinat d’un aussi grand fils de Gagnoa que le médecin Benoît Dacoury-Tabley dont le neveu, maire d’Ouragahio, n’a même pas eu le courage de saluer la mémoire, en lieu et place d’une ode infecte au despote Gbagbo reclus à La Haye ?

I Du  cynisme exponentiel du FPI : une âme collective inhumaine

Il serait maladroit de commencer l’analyse de cette tragédie sans rappeler que le fait fondamental qui nous inspire n’a jamais souffert de la moindre contestation. La Côte d’Ivoire et le monde entier savent que ce sont les ordres du FPI qui ont instruit l’exécution froide du civil Benoît Dacoury-Tabley, médecin de son état, en 2002, à Abidjan. La Côte d’Ivoire et le monde entier savent aussi que depuis 2002, le pouvoir Gbagbo n’a esquissé aucun geste de contrition devant l’ignominie de l’acte commis. Au lieu d’en assumer les retombées maléfiques, le pouvoir frontiste s’était plutôt réfugié dans une logique de la contre-propagande, consistant à mettre les soldats Fanci morts dans les événements de 2002 sur la même balance que les civils délibérément butés par les sbires de Gbagbo. Dans cette confusion des genres et contextes de mort, le FPI ne visait-il pas, ni plus, ni moins, que l’effacement de la trace vivante de ses lâchetés et l’affirmation, en guise de terreur psychologique supplémentaire, d’un cynisme sans borne ?

Le cynisme exponentiel du FPI tient à sa fascination exacerbée pour le pouvoir en tant que moyen de jouissance de l’avoir. Comment autrement expliquer que de soi-disant démocrates qui ont accédé au palais présidentiel à la faveur d’une élection « calamiteuse » en octobre 2000, refusent d’en rejouer l’enjeu dans une élection réellement pluraliste, transparente, et représentative de la densité réelle de la nation ? Le cynisme exponentiel du FPI tient aussi à son instrumentalisation outrancière de la faiblesse et de la vulnérabilité humaines. Elle consiste précisément à frapper sans vergogne les plus faibles pour la simple raison que c’est beaucoup plus facile : l’Orphelin, l’Etranger, l’Apatride, le Malade, la Veuve sont les cibles favorites d’un parti qui de la gauche, n’a conservé que le vernis soporifique, mais qui au fond ne rêve que de pureté nationale, méritant ainsi les louanges de l’extrémiste française Marine Le Pen  et de son sulfureux géniteur. C’est donc face à des hordes sans foi ni loi que le Docteur benoît Dacoury-Tabley, ce brave médecin de Kpapekou, altruiste dans l’âme, au service de Laurent Gbagbo quand celui-ci tirait pourtant le diable par la queue, est tombé sous des balles aveugles à son exceptionnelle humanité. Ce sont ces ogres immoraux qui sur la place Laurent Gbagbo de Gagnoa, jetèrent le mort hors de sa bière, comme dans la tragédie de l’Antigone de Sophocle, Créon voulut faire livrer le corps de Polynice aux chiens…

On dut donc cacher le corps profané du Dr. Dacoury-Tabley à Oumé, pendant que les extrémistes du FPI de Gagnoa traquaient sa dépouille sans âme, fiers et heureux d’exécuter les ordres honteux d’un homme que certains ont la bassesse de considérer encore aujourd’hui comme une monnaie d’échange pour le succès du processus de réconciliation nationale des Ivoiriens. Le FPI continuera-t-il, toute honte bue, de jouer les saintes nitouches de la république ?

II La prétention du FPI à la sainteté : un suicide politique programmé

La réalité de l’affaire est donc connue. Loin de pouvoir se cacher derrière son petit doigt, le FPI est connu, depuis le charnier d’octobre 2000, comme le parti qui tue sans l’ombre d’un remords. Allant plus loin que Créon dans la tragédie de Sophocle, le FPI sort le mort de sa bière et le jette aux chiens, alors que le tyran de la mythologie grecque s’était seulement contenté de menacer de le faire ! Le FPI est amplement connu, comme le parti qui a donné froidement la mort à un ancien chef d’Etat et à son innocente épouse. Le FPI est notoirement connu, comme le parti qui a acculé Guillaume Soro et ses concitoyens exclus, à recourir en légitime défense à la résistance armée pour ne pas être écrasés ou chassés de leur pays par la faconde ivoiritaire qui hante encore jusqu’à ce jour, les débats nationaux sur le foncier rural, l’apatridie et la nationalité. Comment envisager un avenir politique au parti qui a tué sans remords le docteur Benoît Dacoury-Tabley ? Le FPI peut-il sortir de son identité de barbarie à visage humain ? On doit, sans cesse, au nom de la réconciliation des Ivoiriens, persister dans un pari pour le changement et envisager que la liberté serve enfin chez les ouailles de la Refondation, à faire éloge à la responsabilité.

Une première issue est possible : que le FPI fasse table rase de sa propension à la criminalisation outrancière de la politique ivoirienne, en avouant que c’est lui qui a ouvert la boîte de Pandore de la mort abjecte dans ce pays. Il faudrait alors que résolument, le FPI, sans condition, demande pardon pour tous les malheurs qu’il a si régulièrement infligé aux populations de Côte d’Ivoire. Y-a-t-il quelque chance pour une telle conversion morale intérieure ? On parle depuis peu de la présence, au cœur du FPI, d’une aile modérée, qui attendrait d’être libérée de l’hypothèque-Gbagbo pour jouer pleinement son rôle d’opposition républicaine. Mais comment oublier la duplicité caractéristique du frontisme ? Voici un Boga Sivori, sympathisant ardent de la visite du président Guillaume Soro dans le Gôh, qui, la bouche pleine des présents fraternels du visiteur, s’empresse de le poignarder dans le dos par un communiqué sibyllin, soi-disant publié pour se protéger des extrémistes de son camp ! Voici un Dano Djédjé, fort en thème dans l’agression médiatique organisée contre Guillaume Soro à la veille de sa visite d’Etat dans la région de Gagnoa, qui revient, dans sa logique du gringalet, jurer ses grands dieux qu’il n’a pas l’âme d’un tueur, alors même que le sens de son agression délibérée contre Guillaume Soro consistait essentiellement en cette menace de représailles mortelles ! C’est donc à croire qu’on doit désespérer du FPI, si le ver s’avère aussi répandu dans le fruit !

Il existe dès lors une seconde issue possible à l’indifférence du FPI devant ses propres crimes de sang : le suicide politique de la formation frontiste réside précisément en son discrédit moral irréversible dans l’Histoire de la Côte d’Ivoire. Parti d’agresseurs fieffés qui se réfugient volontiers après les répliques des agressés dans les rhapsodies victimaires de la lâcheté, le FPI a peut-être fini de donner la moindre once de positivité à la vie publique ivoirienne. Il faut libérer les populations captives du FPI et siphonner tous ses fiefs par la vérité, la justice et le développement concrets. IComme on l’a vu dans la région du Gôh, justice sera peut-être rendue au regretté docteur Benoît Dacoury-Tabley quand le FPI, soudain conscient de sa vacuité intérieure et de la fin de sa mission historique, prononcera lui-même sa messe de requiem en s’absentant de toutes les scènes de la politique ivoirienne, au soir amer de sa vie. Et ce ne sera que justice…Car, oui, peut-être faut-il tout simplement laisser le FPI pourrir de sa propre pourriture, mourir de sa propre et belle mort.

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