Soro : sortir du syndrome Fabius pour suivre la tentation Macron ou périr

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Guillaume Soro occupe une place centrale dans la vie politique ivoirienne : incontournable hier, il reste encore incontournable aujourd’hui. Sa carrière politique connaît une grande longévité : celui qui a été Premier ministre à 36 ans semble encore bon pour le service, et dispose de la possibilité d’avoir encore une trentaine d’années de vie publique et politique. Peut-il être élu Président de la République en 2020 (il aura alors 48 ans) ? Tous les leaders « précoces » ont connu un destin différent. Examinons deux voies qui s’offrent à Guillaume Soro, l’une qui l’oblige à sortir du syndrome Fabius, l’autre qui est la tentation de suivre l’exemple de Macron.
1.      Sortir du syndrome Fabius
En juillet 1984, à 38 ans, Laurent Fabius est nommé Premier ministre et devient ainsi le plus jeune chef de gouvernement de la Cinquième République. Homme politique brillant, il est promis à un grand avenir. L’affaire du « sang contaminé » va définitivement le « plomber » et « contaminer » sa vie politique.
S’il occupe différentes fonctions importantes et d’influence, (ministre, Président de l’Assemblée nationale), il ne pourra toutefois jamais plus être candidat à la présidence de la République : en 2006, il se porte candidat à la primaire socialiste en vue de l’élection présidentielle de 2007, mais il est devancé par Dominique Strauss-Kahn et par Ségolène Royal, qui remportera cette primaire.
A l’affaire du « sang contaminé », s’ajoute une certaine arrogance qui donne de lui une image négative. Dans un monde qui change, sa voix est devenue inaudible.
Le parallèle avec Guillaume Soro est évident : jeune Premier ministre, à 36 ans, il a occupé toutes les fonctions importantes (PM, ministre, Président de l’assemblée nationale).
L’« affaire » qui risque de le plomber dans la course à la présidentielle, si cette « affaire » existe encore, est peut-être son passé de « chef des rebelles ».
D’ailleurs, que reste-t-il de l’ « Accord de Ouagadougou » ? Pas grande chose , si ce n’est une crise post-électorale qui a fait 3000 morts, et qui ravive le souvenir douloureux de la crise politico-militaire de 2010. Ce n’est pas pour rien que le dixième anniversaire de cet accord est passé sous silence , sans aucun rappel par aucun de ses signataires !
Les Ivoiriens pourront-ils oublier ce passé ? Il n’est pas sûr qu’au PDCI et au sein du RHDP, on oublie ce passé. S’ajoutent, chez Guillaume Soro,  une certaine arrogance et une part d’ombres qui font peur. Si le RHDP organise une « primaire », est-il sûr que Guillaume Soro l’emporte.
 N’est-il donc pas urgent, pour le Président de l’Assemblée nationale , de sortir du syndrome Fabius. L’une des voies possibles est de céder à la tentation Macron.
2.      La tentation Macron
Après avoir démissionné du gouvernement, Emmanuel Macron crée, le 6 avril 2016, son mouvement En Marche. Un an après, il est élu Président de la République français, et est en passe d’obtenir une majorité absolue à l’assemblée nationale lors des législatives de juin 2017.
Totalement inconnu avant son entrée au gouvernement, Macron a construit sa victoire sur le discrédit dont souffrent les partis politiques traditionnels en France. Ce discrédit frappe aussi les grands partis de gouvernement ivoiriens, comme en témoignent, lors des dernières élections, la montée de l’abstention et le nombre de députés indépendants élus contre les candidats « officiels ».
Ce mouvement risque de s’amplifier en 2020. Les électeurs crient de moins en moins à l’alternance politique partisane pour répondre à leurs préoccupations et résoudre les difficultés de la vie quotidienne. Aujourd’hui, un Président Rdr, demain un Président Pdci ! Et après ?
D’ailleurs, certains songent à quitter le gouvernement vers la fin 2018, afin de bâtir une version ivoirienne du mouvement « macronnien » En Marche et sortir ainsi de la malédiction des partis traditionnels des partis de gouvernement.
Ils sont convaincus que les Ivoiriens attendent une autre manière de faire de la politique, de gouverner et de travailler. Ils considèrent que la classe politique traditionnelle est en retard sur les évolutions de la société (dynamisme entrepreneurial,  dynamisme de la jeunesse, leadership féminin qui s’affirme, classes moyennes qui ont soif de démocratie et de consommation, etc.)
Guillaume Soro peut-il être tenté de suivre l’exemple de Macron ? Le leadership mondial des idées se situe-t-il du côté de la transition générationnelle (Macron, Trudeau, l’Irlandais Léo Varakdar) ?
Conclusion
Les qualités de Guillaume Soro sont évidentes : esprit brillant, il a su se donner une stature d’homme d’État et une dimension internationale. Ses discours se construisent aujourd’hui autour des idées de pardon et de réconciliation. Il a toujours été d’une fidélité absolue, respectant scrupuleusement les engagements qu’il avait pris avec Ouattara. A l’Assemblée nationale, il sait travailler avec tous les groupes parlementaires. Il s’active, avec succès, au sein de l’assemblée parlementaire  de la Francophonie, dont il vise la présidence.
Or, la présidence de cette Assemblée parlementaire, par le réseau qu’elle permet de construire, est un excellent tremplin pour devenir Président de la République dans son pays, à l’image de Roch-Marc Christian Kaboré, le Burkinabè. Alors question : saura-t-il résister à là malédiction Fabius , pour incarner l’alternance façon « Macron », pour ne pas dire « alternance générationelle ».

Tieba Nakouzon Coulibaly

Lementor.net

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