Au Mali, « Toroh Behi » est devenu une expression courante pour décrire la réalité quotidienne des Maliens. Ce terme, qui signifie littéralement « les choses sont difficiles », capture parfaitement l’état d’esprit d’une population qui peine à faire face à une crise économique et financière implacable. Autrefois porteurs d’un espoir immense après les coups d’État menés par le Colonel Assimi Goïta, les Maliens voient aujourd’hui leurs rêves de changement s’évanouir, remplacés par une amertume profonde face à une situation de plus en plus désespérée.
Une Crise Économique Inexorable
Les difficultés économiques du Mali se sont considérablement aggravées ces dernières années. Le pays, déjà fragile avant les coups d’État de 2020 et 2021, a vu sa situation empirer sous la gouvernance de la junte militaire. Les sanctions économiques imposées par la CEDEAO en réponse à la transition militaire, bien que partiellement levées, ont laissé des cicatrices profondes dans l’économie malienne. Les prix des denrées de base ont explosé, le chômage a atteint des niveaux alarmants, et la pauvreté est plus présente que jamais.
Les Maliens, autrefois pleins d’espoir pour un renouveau national après la chute des régimes précédents, sont aujourd’hui confrontés à une réalité brutale : les promesses de redressement économique n’ont pas été tenues. Les marchés sont désertés, les commerçants luttent pour survivre, et les familles peinent à joindre les deux bouts. Dans les campagnes, la situation est encore pire, avec des récoltes insuffisantes et une insécurité alimentaire qui touche des millions de personnes.
Un Fossé Grandissant entre les Élites et la Population
Alors que la majorité des Maliens souffrent de la crise, une petite élite semble prospérer dans l’opulence. Le fossé entre les tenants du pouvoir et la population s’est considérablement élargi. Les membres de la junte militaire, ainsi que leurs proches et alliés, affichent un train de vie qui contraste de manière choquante avec la précarité dans laquelle vit la majorité des Maliens. Voitures de luxe, villas somptueuses et dépenses ostentatoires sont devenues monnaie courante parmi les nouveaux dirigeants, suscitant colère et frustration parmi une population qui se sent de plus en plus abandonnée.
Cette situation rappelle tristement les régimes précédents, où la corruption et l’enrichissement personnel étaient à l’ordre du jour. Les Maliens, qui avaient espéré une rupture avec ces pratiques, sont aujourd’hui confrontés à une réalité décevante : le changement tant attendu n’est pas venu, et les nouveaux dirigeants semblent avoir succombé aux mêmes travers que leurs prédécesseurs.
La Perte de l’Espoir et l’Échec de la Révolution Malienne
Le sentiment de désillusion est palpable à travers tout le pays. Les Maliens, qui avaient nourri l’espoir d’un renouveau après les coups d’État, se retrouvent face à un gouvernement militaire qui semble incapable de répondre à leurs attentes. Les promesses de sécurité, de développement et de justice sociale sont restées lettre morte. La sécurité, en particulier, s’est encore dégradée, avec des groupes terroristes qui continuent de semer la terreur dans le nord et le centre du pays, tandis que l’État peine à rétablir son autorité.
Au-delà de la crise économique et sécuritaire, c’est un véritable malaise social qui se fait sentir. Les Maliens, qui avaient cru en la possibilité d’un changement radical, sont aujourd’hui désabusés. L’espoir d’un Mali plus juste, plus prospère, et plus sûr semble s’éloigner chaque jour un peu plus. La révolution malienne, portée par des aspirations légitimes de liberté et de dignité, apparaît désormais comme un échec cuisant.
« Toroh Behi » : Un Cri de Désespoir
« Toroh Behi » n’est pas seulement une expression de la difficulté, c’est un cri de désespoir. Au Mali, ce cri résonne dans chaque ville, chaque village, chaque foyer. Il symbolise la souffrance d’un peuple qui se sent trahi par ses dirigeants, abandonné par la communauté internationale, et accablé par une crise sans fin.
Le Mali, autrefois symbole de résilience et de résistance, est aujourd’hui à genoux. La révolution malienne, qui promettait tant, a échoué à apporter le changement tant attendu. Et pour les millions de Maliens qui continuent de lutter chaque jour pour leur survie, le futur s’annonce sombre, avec peu de lumière à l’horizon. « Toroh Behi », en effet, et rien ne semble indiquer que les choses vont s’améliorer de sitôt.
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