Par AN | Lementor.net
La Côte d’Ivoire s’apprête à vivre un scrutin présidentiel hautement controversé ce samedi 25 octobre 2025. Le président sortant Alassane Ouattara, 83 ans, brigue un quatrième mandat dans un contexte marqué par l’exclusion de plusieurs figures majeures de l’opposition et des appels à manifester « tous les jours » lancés par le Front Commun.
Un scrutin amputé de ses principales figures d’opposition
L’élection présidentielle de 2025 se déroule dans des conditions exceptionnellement tendues. Le Conseil constitutionnel a rejeté le 8 septembre dernier 55 candidatures sur 60 dossiers soumis, ne retenant que cinq candidats. Parmi les exclus figurent des personnalités de premier plan : l’ancien président Laurent Gbagbo, l’ancien Premier ministre Guillaume Soro, l’ex-ministre Tidjane Thiam, ainsi que Charles Blé Goudé et Pascal Affi N’Guessan.
Ces invalidations massives ont provoqué la colère d’une partie importante de l’opposition. Le Parti des peuples africains de Côte d’Ivoire (PPA-CI) avait exigé en vain, dès le 19 mars 2025, l’inscription de Laurent Gbagbo sur la liste électorale. Les quatre figures politiques écartées ne peuvent désormais ni se présenter à l’élection, ni même voter.
Alassane Ouattara : expérience contre controverse
Officiellement investi candidat par le Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP) le 21 juin, Alassane Ouattara n’a confirmé sa candidature que lors d’un discours télévisé le 29 juillet. Au pouvoir depuis 2010, le président sortant justifie sa candidature par son expérience, qu’il juge nécessaire face aux défis du pays.
Sa première élection en 2010 s’était soldée par une grave crise politique et une guerre civile qui avait duré cinq mois, aboutissant à l’arrestation de Laurent Gbagbo retranché dans la résidence présidentielle de Cocody. Quinze ans plus tard, le spectre de cette période troublée continue de planer sur la vie politique ivoirienne.
Grand favori du scrutin grâce aux importants moyens mobilisés par son parti, Ouattara a lancé sa campagne officielle le 11 octobre à Daloa, dans l’ouest du pays, un bastion historique de l’opposition où le RHDP est parvenu à s’implanter progressivement.
Une opposition fragmentée et mobilisée
Face au président sortant, quatre candidats sont en lice. Parmi eux figurent notamment l’ex-première dame Simone Ehivet Gbagbo et un ancien ministre du Commerce, député dissident du PDCI. L’opposition part en ordre dispersé, affaiblie par ses divisions internes et les moyens financiers considérables du parti au pouvoir.
Malgré cette fragmentation, la mobilisation reste forte. Le Front Commun, qui regroupe les formations de Tidjane Thiam et Laurent Gbagbo, a appelé dimanche 12 octobre à manifester quotidiennement pour réclamer un dialogue politique, à moins de deux semaines du scrutin. Des rassemblements ont eu lieu à Abidjan le 11 octobre en dépit de l’interdiction, avant que les manifestants ne soient dispersés par les forces de l’ordre.
Ces derniers mois, plusieurs arrestations de membres de l’opposition ont été effectuées. Les autorités maintiennent que ces interpellations n’ont aucun lien avec l’appartenance politique des personnes concernées, une affirmation contestée par le premier parti d’opposition qui dénonce des arrestations « sans motif précis ».
Un scrutin sous surveillance internationale
L’élection de 2025 marque le deuxième scrutin organisé sous la Constitution ivoirienne de 2016. Cette nouvelle loi fondamentale a assoupli les conditions de nationalité pour les candidats : désormais, un seul parent doit posséder la nationalité ivoirienne de naissance, contre les deux auparavant. Les candidats peuvent également avoir détenu une autre nationalité, à condition d’y renoncer avant de soumettre leur candidature.
Avec une liste électorale définitive publiée le 4 juin et comportant près de 8 millions d’électeurs, la Côte d’Ivoire s’attend à un taux de participation scruté de près par la communauté internationale. La Commission électorale indépendante avait lancé dès octobre 2024 une vaste opération d’enrôlement visant à inscrire 4,5 millions de nouveaux électeurs, avec la mise en place de 12 000 centres dans tout le pays.
Si aucun candidat n’obtient la majorité absolue au premier tour ce samedi, un second tour sera organisé le dernier samedi de novembre entre les deux candidats arrivés en tête. Dans ce climat de tensions politiques et sociales, la question de la crédibilité et de la légitimité du scrutin reste au cœur des préoccupations, tant pour les Ivoiriens que pour les observateurs internationaux.
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