Par La Rédaction
Le chiffre a de quoi inquiéter : plus de 27 millions de tentatives d’attaques cybernétiques ont été recensées en Côte d’Ivoire en 2024, selon le dernier rapport de l’entreprise de cybersécurité Kaspersky. Derrière ce nombre vertigineux se cache une réalité plus profonde et plus stratégique : la vulnérabilité croissante d’un pays en pleine transition numérique, où les infrastructures industrielles deviennent des cibles de plus en plus prisées par les cybercriminels.
Longtemps épargnée par les grandes offensives numériques qui frappaient surtout les pays industrialisés, la Côte d’Ivoire entre désormais dans la zone de risque critique. L’industrialisation accélérée de son économie – zones industrielles, automatisation, digitalisation des chaînes logistiques – crée un terrain d’exposition inédit. Ces structures sont connectées, certes, mais souvent mal protégées. Or, dans le cyberespace, une faille vaut une attaque.
L’alerte lancée par Kaspersky concerne en premier lieu les entreprises publiques et privées impliquées dans les secteurs stratégiques : énergie, transport, télécommunications, banques, logistique portuaire. Autant de nœuds vitaux qui, en cas de paralysie, pourraient avoir des répercussions économiques et sociales majeures. Des simulations menées par des experts locaux montrent qu’une interruption de 48 heures dans certains hubs industriels du pays pourrait générer des pertes équivalentes à plusieurs milliards de FCFA.
La menace est aussi géopolitique. Dans un contexte mondial de reconfiguration des rapports de force, les attaques numériques ne sont plus seulement l’œuvre de pirates isolés mais parfois d’acteurs étatiques ou de groupes organisés visant à déstabiliser des économies émergentes. La Côte d’Ivoire, avec son leadership croissant en Afrique de l’Ouest, devient une cible à haute valeur stratégique.
Face à cette montée en puissance du cyber-risque, les réponses restent encore timides. Si certaines institutions ont renforcé leurs pare-feux et mis en place des centres de supervision, l’ensemble du tissu industriel ivoirien n’est pas encore au niveau de vigilance requis. La sensibilisation est inégale, les investissements en cybersécurité souvent relégués au second plan dans les budgets, et la coordination entre acteurs publics et privés encore perfectible.
Le gouvernement, conscient de l’enjeu, a engagé plusieurs chantiers, notamment la mise à jour du cadre légal sur la cybersécurité et le projet de création d’une Agence nationale de sécurité numérique. Mais le défi est immense. Il exige une mobilisation collective : entreprises, administrations, start-ups technologiques et société civile doivent bâtir une véritable culture du risque numérique.
Car en 2025, la guerre ne se joue plus seulement sur le terrain, mais aussi dans les réseaux. Et dans ce domaine, mieux vaut prévenir que subir. La Côte d’Ivoire, moteur régional, ne peut se permettre une paralysie numérique. C’est toute sa souveraineté économique qui en dépend.
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