Par Jean Pierre Assa
La visite d’amitié et de travail du président guinéen Mamadi Doumbouya à Abidjan le 17 juin 2025 marque un tournant décisif dans les relations bilatérales entre la Guinée et la Côte d’Ivoire. Accueilli avec les honneurs par son homologue Alassane Ouattara, le chef de la transition guinéenne a affiché une volonté claire de renforcer les liens entre les deux pays, dans un contexte régional marqué par des défis sécuritaires, économiques et politiques communs.
Lors de la conférence conjointe tenue au palais présidentiel, Mamadi Doumbouya a salué la « stabilité politique » de la Côte d’Ivoire, qu’il a qualifiée de « socle de développement » pour l’ensemble de la sous-région. Une déclaration lourde de sens, dans un espace ouest-africain secoué ces dernières années par des coups d’État, des tensions sociales et une montée de l’insécurité transfrontalière. La stabilité ivoirienne, couplée à sa croissance économique soutenue, fait d’Abidjan une capitale incontournable dans les dynamiques régionales, ce que Conakry semble désormais reconnaître ouvertement.
Cette rencontre entre les deux chefs d’État a également permis d’aborder des sujets de coopération économique, d’interconnexion énergétique, de lutte contre le terrorisme et de circulation des personnes et des biens. Si les déclarations officielles sont restées mesurées, des sources diplomatiques évoquent la possibilité d’accords à venir dans les domaines des transports, de l’exploitation minière et de l’enseignement supérieur.
La symbolique de cette visite ne doit pas être sous-estimée. Elle intervient dans un contexte où la Guinée, dirigée depuis 2021 par un régime militaire, cherche à briser son isolement diplomatique tout en multipliant les signaux d’ouverture. La Côte d’Ivoire, quant à elle, poursuit sa stratégie d’ancrage régional en tissant des partenariats ciblés avec les pays de la zone Mano River et du Sahel.
Le rapprochement entre Abidjan et Conakry s’inscrit donc dans une logique de convergence pragmatique, fondée sur la reconnaissance mutuelle des enjeux communs : stabilité, développement et coopération. En choisissant de venir à Abidjan, Mamadi Doumbouya envoie un message politique fort à la CEDEAO et à l’opinion publique africaine. La Côte d’Ivoire, elle, réaffirme son rôle de pôle d’influence en Afrique de l’Ouest.
Il reste désormais à transformer cette volonté politique en actions concrètes. Si la visite du président guinéen n’a pas encore accouché de protocoles d’accords signés, elle jette les bases d’une alliance stratégique potentiellement déterminante dans le nouvel échiquier régional.
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