Par AN | Lementor.net
Le Parti des Peuples Africains – Côte d’Ivoire (PPA-CI) de l’ancien président Laurent Gbagbo a officialisé sa position dans un document adressé au Conseil Constitutionnel, dénonçant la candidature du président sortant Alassane Ouattara et plaidant pour la validation de celle de son leader.
D’entrée de jeu, le parti dirigé par Laurent Gbagbo dresse un tableau sombre de la période pré-électorale, accusant le pouvoir en place du Rassemblement des Houphouëtistes pour la Démocratie et la Paix (RHDP) de réunir « toutes les conditions d’une déflagration de la paix sociale » pour se maintenir au pouvoir. Le PPA-CI affirme avoir tout tenté pour éviter cette escalade, notamment en participant au dialogue politique et en adressant, sans réponse, deux courriers au Premier ministre pour relancer la question de l’inscription de Laurent Gbagbo sur les listes électorales.
Le cœur de l’argumentaire du PPA-CI repose sur une lecture stricte des Constitutions ivoiriennes de 2000 et 2016. Le parti cite les articles 55 et 183 de la loi fondamentale actuelle. L’article 55 stipule que le président « n’est rééligible qu’une seule fois ». L’article 183 précise que l’ancienne législation reste applicable si elle n’est pas contraire à la nouvelle Constitution.
Selon le PPA-CI, l’article 35 de la Constitution de 2000, en vigueur au moment de l’adoption de la nouvelle Constitution en 2016, disait strictement la même chose. Alassane Ouattara, qui entamait alors son deuxième mandat, aurait donc épuisé son droit à la réélection dès 2020. Le parti qualifie son troisième mandat de 2020, validé par le Conseil Constitutionnel de l’époque mais obtenu « au prix de plusieurs pertes en vie humaine », d’« illégalité ». Briguer un quatrième mandat équivaudrait ainsi à une « récidive ».
« Le cumul de deux illégalités ne confère nullement la légalité. La récidive ne confère point la légalité. Au contraire elle renforce la faute », assène le texte.
Concernant Laurent Gbagbo, le PPA-CI avance une batterie d’arguments juridiques. Il estime que son candidat remplit toutes les conditions de l’article 55 de la Constitution : âge (80 ans), nationalité ivoirienne d’origine et jouissance de ses droits civils et politiques.
Le parti balaye l’argument d’une condamnation, la jugeant émanant d’une « juridiction incompétente » et surtout, jamais notifiée à l’intéressé. Il souligne qu’aucune déchéance de droits civiques n’a été prononcée, ce qui est corroboré par le fait que Laurent Gbagbo est légalement président de son parti, une fonction qui exige de jouir de ses droits politiques.
Le PPA-CI s’appuie également sur une décision du Comité des droits de l’Homme de l’ONU en date du 20 août 2025, qui aurait enjoint à l’État ivoirien de « garantir l’exercice effectif » des droits politiques de Laurent Gbagbo. Rappelant la primauté des traités internationaux sur le droit interne (article 123 de la Constitution), le parti met en garde le Conseil Constitutionnel contre toute décision qui irait à l’encontre de cet engagement.
Au-delà du droit, le PPA-CI place le combat dans une dimension morale, citant Martin Luther King et Desmond Tutu sur le devoir de désobéir aux lois injustes. Le parti présente la candidature de Laurent Gbagbo comme un acte de résistance contre « l’arbitraire » et une « capitulation » que le régime lui imposerait.
Face à ce qu’il perçoit comme une volonté de « passage en force » du RHDP, le PPA-CI annonce une « confrontation politique » inévitable, mais promet de la mener « sans arme, ni violence, mais avec détermination, en utilisant tous les leviers démocratiques ». La direction du parti a promis de donner prochainement des mots d’ordre pour une mobilisation pacifique.
La balle est désormais dans le camp du Conseil Constitutionnel, que le PPA-CI appelle à assumer ses responsabilités « devant l’histoire » pour éviter à la Côte d’Ivoire « une autre page sombre ».
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