Dans le monde politique, une alliance ne se résume pas à un simple arrangement de gestion du pouvoir, mais à une union d’idées et de visions partagées pour construire une société meilleure. Une véritable alliance politique repose d’abord sur une convergence idéologique avant de s’appuyer sur des objectifs communs en matière de politique. Malheureusement, en Côte d’Ivoire comme dans de nombreux autres pays, cette distinction est souvent négligée. Les alliances politiques y apparaissent trop souvent comme des arrangements de circonstance, fondés sur des intérêts stratégiques à court terme, au détriment d’une base idéologique solide.
En théorie, une alliance politique doit reposer sur des valeurs partagées, notamment autour de la gouvernance de l’État, de l’éducation, de l’emploi ou encore des questions de justice sociale. Cependant, lorsque ces alliances ne sont fondées que sur des intérêts politiques immédiats, elles sont vouées à l’échec. Cela revient à créer un « mariage de convenance » où les partenaires, bien qu’unis temporairement, n’ont pas les mêmes conceptions de la société. Cette incohérence interne devient rapidement un obstacle à la mise en œuvre de politiques cohérentes et efficaces, créant des conflits qui affaiblissent les coalitions et, par extension, la gouvernance nationale.
Il existe pourtant des exemples dans l’histoire où des alliances politiques, construites sur des bases idéologiques communes, ont prouvé leur efficacité et leur longévité. Un exemple classique est celui du Front Populaire en France dans les années 1930. Ce mouvement regroupait des partis de gauche autour d’un projet social commun, incluant des réformes majeures telles que la semaine de travail de 40 heures et les congés payés. L’union reposait sur des valeurs partagées de justice sociale, ce qui a permis d’instaurer des changements profonds dans la société. De même, aux États-Unis, la coopération entre les Démocrates et les Républicains autour de la lutte contre le communisme durant la Guerre froide est un autre exemple d’alliance idéologique réussie. Bien que les deux partis aient des divergences sur des questions internes, leur vision commune en matière de politique étrangère a permis de maintenir une stratégie cohérente pendant plusieurs décennies.
En revanche, certaines alliances ont échoué parce qu’elles n’étaient pas fondées sur des principes idéologiques solides, mais sur des intérêts purement électoraux ou stratégiques. Par exemple, l’alliance entre les libéraux et les conservateurs au Royaume-Uni au début des années 2010 s’est rapidement désintégrée en raison des divergences sur des questions économiques et sociales fondamentales. De même, au Mozambique, l’alliance entre le FRELIMO et la RENAMO dans les années 1990, autrefois ennemis durant la guerre civile, n’a jamais pu instaurer une réelle coopération, en raison du manque de base idéologique commune. Ces exemples montrent que les alliances politiques doivent s’appuyer sur une vision commune pour réussir, sinon elles risquent de se désintégrer face aux défis.
En Côte d’Ivoire, l’histoire politique récente est marquée par des alliances mal comprises et souvent vouées à l’échec. L’exemple le plus récent est l’alliance entre le Front Populaire Ivoirien (FPI) et le Rassemblement des Houphouëtistes pour la Démocratie et la Paix (RHDP) en 2023. Dès le départ, cette union a soulevé des questions, car les deux partis ont des visions fondamentalement différentes de la société. Cette alliance a rapidement montré ses limites, marquée par des rivalités internes, une coordination défaillante, et un manque de clarté quant aux objectifs communs.
De plus, l’alliance n’a pas apporté les gains électoraux escomptés, ce qui a conduit à des accusations mutuelles d’incohérence et à des tensions ouvertes.
Les conséquences de ces alliances mal formées sont lourdes pour les citoyens. En l’absence d’une cohésion idéologique, ces alliances dégénèrent souvent en luttes de pouvoir internes, ce qui affaiblit la capacité des gouvernements à mettre en œuvre des politiques efficaces. Pire encore, les citoyens se retrouvent otages de ces rivalités politiques, subissant les conséquences d’une gouvernance instable et incohérente. Les réformes attendues ne sont pas mises en œuvre, les promesses électorales restent non tenues, et la gestion des affaires publiques devient imprévisible.
En conclusion, les alliances politiques ne devraient jamais être simplement des outils de gestion du pouvoir. Elles doivent être fondées sur des principes partagés et une vision commune de la société. En Côte d’Ivoire, la pratique des alliances opportunistes doit cesser, car elle nuit à la qualité de la gouvernance et, par extension, à l’ensemble des citoyens. Les partis politiques doivent repenser leurs stratégies et former des alliances sur des bases idéologiques solides, en accord avec les aspirations de la population.
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