Le jeudi 23 janvier 2025, le Club des Auteurs de l’Harmattan Guinée a organisé son 19ᵉme Café littéraire, un événement qui s’est imposé comme un rendez-vous incontournable pour les amateurs de littérature et de réflexion critique en Guinée. Ce premier café littéraire de l’année 2025 a mis à l’honneur Aminata Barry, auteure du livre « Le Tourbillon, la dérive autoritaire ».
Un témoignage poignant et personnel
Fille de Diawadou Barry, figure emblématique, intellectuel de renom et ancien collaborateur de Sékou Touré, Aminata Barry incarne le courage et la résilience face à l’arbitraire du pouvoir. Diawadou Barry, alors directeur de l’Imprimerie Nationale Patrice Lumumba, a payé un lourd tribut pour son implication dans l’édition des livres de Sékou Touré. Arrêté et emprisonné au tristement célèbre camp Boiro, il n’en est jamais ressorti. Cette disparition tragique hante l’autrice et légitime les soupçons d’assassinat par fusillade ou pendaison, pratiques courantes sous le régime de Sékou Touré.
Aminata Barry, dans son ouvrage autobiographique, plonge les lecteurs dans ses souvenirs d’enfance marqués par une proximité insoupçonnée avec Sékou Touré, qui deviendra pourtant l’artisan du cauchemar de sa famille à partir de 1969. Le récit relate également son exil forcé : d’étudiante au Sénégal, elle fuit en 1971 vers la Côte d’Ivoire pour échapper à une mort certaine. Sa mère, quant à elle, a mis six longues années à quitter la Guinée, bravant savanes et forêts à pied avant de rejoindre la Côte d’Ivoire en 1977.
1984 : Une annexe charnière
Le récit d’Aminata Barry accorde une place particulière à l’année 1984, marquée par la mort de Sékou Touré, événement accueilli comme une libération par des dizaines de milliers de Guinéens. Cette année a également permis de mettre en lumière l’ampleur des exécutions sommaires, des détentions arbitraires et des atrocités perpétrées sous le régime autoritaire. Aminata Barry exhorte les autorités guinéennes à faire toute la lumière sur ces années sombres et à rendre justice aux victimes de cette époque.
Un événement riche en échanges
La rencontre a rassemblé une trentaine de participants, amis du livre et passionnés de littérature, avides d’en apprendre davantage sur cette période tourmentée de l’histoire guinéenne. Les Écrivaines Fatoumata Sano, et Marie-Paule Huet coordonnatrice du Prix littéraire des lycéens de Guinée, n’ont pas voulu se faire conter ce Café littéraire. Les échanges furent riches et constructifs. Aminata Barry a répondu aux questions avec une franchise émouvante, rappelant que la Guinée a payé un lourd tribut sous la dictature de Sékou Touré. Elle a notamment pointé les contradictions du dictateur, qui exigeait que l’enseignement soit dispensé en langues nationales tout en ne s’exprimant jamais lui-même qu’en français.
Une mémoire vivante
Aminata Barry, en partageant son expérience personnelle et son analyse des 26 années de régime autoritaire, a touché le cœur de son auditoire. « Le Tourbillon, la dérive autoritaire » n’est pas seulement le témoignage d’une jeune fille arrachée à son père, mais aussi un appel vibrant à la justice et à la mémoire collective.
Ce 19ème Café littéraire a confirmé la vocation du Club des Auteurs de l’Harmattan Guinée à servir de plateforme pour des débats intellectuels et des rencontres littéraires de qualité, une plateforme ou de nombreux amis du Livre de la lecture et de la littérature ont reçu gratuitement des livres, pour leur assiduité et leur ponctualité. Au cours de ce Café littéraire, Aminata Barry a su, avec une dignité et une détermination exemplaires, raconter une histoire qui, bien qu’intimement liée à sa propre famille, résonne comme une métaphore de la lutte pour la vérité et la réconciliation nationale en Guinée.
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