ABIDJAN — Le 29 mai 2025 marque une avancée stratégique dans la coopération énergétique entre la Côte d’Ivoire et l’Italie. La multinationale italienne Eni, acteur majeur de l’énergie mondiale, a signé un protocole d’accord avec le ministère ivoirien de l’Agriculture. Objectif : développer la production d’huiles végétales destinées au raffinage de biocarburants. Une initiative qui s’inscrit dans une logique double : valoriser les terres agricoles dégradées et renforcer la filière agricole locale, notamment celle de l’hévéa.
Un partenariat à fort potentiel agricole et énergétique
Selon les termes de l’accord, Eni accompagnera la Côte d’Ivoire dans la mise en place de chaînes de valeur agricoles durables permettant la production d’huiles non alimentaires — notamment à partir de cultures telles que le ricin, le jatropha ou les résidus d’hévéaculture — pour être ensuite raffinées dans ses bioraffineries européennes.
L’approche se veut inclusive : des coopératives locales devraient être impliquées dès la phase pilote, et l’accent sera mis sur la revalorisation de terres marginales, aujourd’hui sous-utilisées. En parallèle, l’État ivoirien y voit une opportunité de redynamiser certaines zones rurales, tout en positionnant le pays sur la carte continentale des biocarburants durables.
Une stratégie verte alignée sur les ambitions climatiques
Cet accord s’inscrit dans la stratégie globale d’Eni en Afrique, déjà visible au Kenya, au Congo et en Angola, où le groupe développe des partenariats similaires. Mais la Côte d’Ivoire se distingue par sa volonté politique affirmée de concilier performance agricole, protection de l’environnement et sécurité énergétique, en conformité avec ses engagements dans le cadre de l’Accord de Paris.
D’un point de vue économique, l’initiative permet aussi à Abidjan de diversifier ses partenariats énergétiques au-delà du pétrole et du gaz offshore, en explorant une nouvelle filière susceptible de générer des revenus durables, des emplois verts et une image internationale renforcée en matière de transition énergétique.
Des défis à anticiper
Reste toutefois à s’assurer que ce modèle n’entraîne pas une compétition foncière entre cultures alimentaires et énergétiques. L’exécutif ivoirien affirme que le projet n’affectera pas les zones à forte productivité vivrière. Néanmoins, des organisations agricoles locales réclament déjà des consultations élargies afin d’éviter une marginalisation des petits exploitants ou une concentration excessive des contrats au profit d’acteurs industriels.
Eni, un partenaire stratégique… et stratégique
L’entrée d’Eni sur ce créneau en Côte d’Ivoire n’est pas anodine. Elle s’inscrit dans un mouvement plus large de redéfinition de la présence des majors pétrolières en Afrique, confrontées à la pression des marchés pour décarboner leurs activités. En investissant dans les biocarburants, Eni anticipe les mutations du secteur énergétique mondial tout en consolidant son ancrage africain.
Pour la Côte d’Ivoire, il s’agit de transformer un défi climatique en levier économique, à condition d’assurer un pilotage rigoureux, équitable et durable de ce partenariat.
La Rédaction
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