Par La Rédaction
La tribune d’AHILE Fernand, Secrétaire National Technique du PPA-CI, appelant publiquement le ministre Ahoua Don Mello à se présenter à l’élection présidentielle de 2025, sonne comme un signal d’alarme lancé depuis l’intérieur même du parti de Laurent Gbagbo. Ce qui, jusqu’ici, se murmurait dans les couloirs militants s’affiche désormais au grand jour : la stratégie actuelle du PPA-CI, centrée uniquement sur la candidature de Gbagbo, est jugée par certains comme risquée, irréaliste, et potentiellement dangereuse pour la stabilité politique du pays.
Le cœur du débat repose sur une impasse juridique difficile à ignorer. Radié de la liste électorale définitive, Laurent Gbagbo, malgré l’attachement symbolique qu’il incarne, se retrouve dans l’incapacité de concourir à l’élection. Or, plutôt que d’anticiper cette situation en désignant dès à présent des candidats dits « de précaution », le parti choisit de maintenir coûte que coûte son nom, misant sur une éventuelle validation par le Conseil constitutionnel. Une posture perçue par AHILE comme un pari insensé, voire comme un acte d’aveuglement politique.
Le recours au ministre Ahoua Don Mello, personnalité respectée au sein du parti, apparaît ici comme un appel au sursaut. Celui qui fut l’un des premiers à évoquer cette stratégie d’anticipation avant même la convention du 10 mai 2024, se voit aujourd’hui désigné publiquement comme l’alternative crédible, susceptible de préserver l’unité du parti tout en maintenant vivante l’ambition présidentielle du PPA-CI. Ce choix ne serait pas un reniement, mais une voie de continuité stratégique et de salut électoral.
Cette sortie vient surtout révéler une fracture silencieuse mais profonde au sein du parti. Entre les fidèles d’une ligne « gbagboïste » intégrale et les pragmatiques inquiets d’un nouveau boycott électoral, le débat se tend. Les mises en garde d’AHILE sont claires : l’entêtement pourrait engendrer une nouvelle crise électorale, nourrir le désarroi des militants, et laisser le champ libre aux adversaires politiques.
Le silence observé par la direction du PPA-CI face à ces avertissements contraste avec la gravité du moment. À quelques semaines du dépôt des candidatures, continuer à faire comme si l’obstacle juridique pouvait être ignoré, c’est courir le risque d’une marginalisation volontaire. Dans une démocratie jeune encore marquée par les blessures du passé, chaque scrutin présidentiel est un test de maturité. Refuser d’y participer ou s’y engager sans préparation, c’est trahir non seulement un parti, mais aussi les espoirs d’un électorat qui aspire à être représenté.
En réclamant une candidature de Don Mello, AHILE ne s’oppose pas à Gbagbo. Il cherche à prolonger, autrement, le combat politique d’un homme auquel il demeure fidèle. C’est peut-être là que réside la clé de lecture de cette tribune : entre fidélité affective et responsabilité politique, il faut choisir l’intérêt du pays. Car libérer la Côte d’Ivoire, écrit-il, c’est aussi libérer Gbagbo. Une formule forte, pour une vérité difficile à entendre, mais peut-être salvatrice.
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