Par La Rédaction | Lementor.net
Lundi 18 août 2025, Bamako a retenu son souffle. Choguel Kokalla Maïga, ancien Premier ministre et figure de la transition malienne, a comparu ce matin devant le Procureur général de la Cour suprême dans le cadre d’une enquête pour détournement de fonds publics. Cette convocation, après six jours d’une garde à vue prolongée et exceptionnelle, marque un tournant judiciaire et politique dans la trajectoire d’un homme qui s’était fait le chantre de la bonne gouvernance.
Arrêté le 12 août, Choguel Maïga est soupçonné de malversations financières durant sa gestion de l’Agence de gestion du fonds d’accès universel (AGEFAU) et de la Primature entre 2021 et 2024. Selon les conclusions d’un rapport du Vérificateur général, il lui est reproché des atteintes aux biens publics et un usage de faux documents administratifs. Placé en garde à vue au pôle économique et financier de Bamako, l’ancien chef du gouvernement a vu sa détention prolongée au-delà du délai habituel, une mesure qui a suscité de nombreuses interrogations dans l’opinion publique. Ses conditions de détention ont également alimenté la controverse : téléphones confisqués, interdiction de visites, inconfort matériel tel qu’il lui aurait fallu passer plusieurs nuits assis, faute d’aménagement adéquat.
Pourtant, malgré la gravité des accusations et le retentissement médiatique de l’affaire, le silence assourdissant du paysage politique malien intrigue. Aucun parti, aucun leader majeur ne s’est publiquement porté à la défense de Choguel Maïga. Ses anciens alliés du M5-RFP, qui l’avaient soutenu dans sa conquête du pouvoir au cœur de la transition, semblent aujourd’hui prendre leurs distances. Ce retrait témoigne d’un isolement politique de plus en plus marqué, comme si la page Choguel était tournée et que plus personne ne voulait assumer le risque de s’associer à son sort judiciaire.
La Cour suprême détient désormais les clés de l’avenir de l’ancien Premier ministre. Les options sont claires : une inculpation assortie d’un mandat de dépôt, ou une libération qui ouvrirait une tout autre dynamique. Quelle que soit l’issue, l’affaire marque un moment de vérité pour la justice malienne. Elle met à l’épreuve la promesse d’une gouvernance vertueuse, dans un pays où les procès pour corruption et détournements de fonds publics sont souvent perçus comme des instruments politiques autant que comme des mécanismes de reddition des comptes.
L’audience du 18 août ne scelle pas seulement le destin personnel de Choguel Kokalla Maïga. Elle reflète aussi les tensions profondes d’un Mali en quête de stabilité, partagé entre la nécessité de sanctionner les dérives et le risque de transformer la justice en champ de règlements de comptes politiques. Dans cette affaire, l’opinion attend moins un verdict spectaculaire qu’une démonstration d’indépendance judiciaire, gage de crédibilité pour l’État malien.
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