Par La Rédaction | Lementor.net
À mesure que l’élection présidentielle d’octobre 2025 approche, l’espace numérique ivoirien ressemble à une place publique effervescente où s’entremêlent débats, rumeurs, dénonciations et propagande. Facebook, X, TikTok et WhatsApp sont devenus des terrains de campagne à part entière, où chaque camp politique tente de marquer des points, mais aussi où les fausses informations prolifèrent à une vitesse vertigineuse. Dans ce climat électrique, les autorités multiplient les avertissements et ont lancé la campagne « Stop aux sorciers numériques » pour lutter contre la désinformation.
L’initiative cible particulièrement les jeunes, premiers consommateurs et diffuseurs d’informations en ligne. Des sessions de sensibilisation sont organisées dans les établissements scolaires, avec des mises en garde claires : « Une image sortie de son contexte peut déclencher des tensions », martèlent les formateurs. Cette prévention s’appuie sur des exemples concrets. La semaine dernière, une vidéo montrant des heurts dans un autre pays africain a été largement partagée comme s’il s’agissait de violences à Abidjan. En quelques heures, elle avait déjà généré des dizaines de milliers de vues et alimenté des commentaires indignés avant que la vérification ne rétablisse la vérité.
Les journalistes, eux, se disent submergés par la quantité d’informations non vérifiées qui circulent. « Nous passons parfois plus de temps à démentir qu’à informer », confie un rédacteur en chef d’un grand quotidien abidjanais. Des plateformes locales de fact-checking comme IvoireCheck ou AfricaCheck redoublent d’efforts, mais peinent à contenir l’ampleur du phénomène.
Pour les internautes, la frontière entre information et intox devient de plus en plus floue. Certains affirment ne plus savoir qui croire. « On reçoit tellement de messages contradictoires dans nos groupes WhatsApp que c’est impossible de savoir ce qui est vrai », témoigne Mariam, étudiante à Cocody. Cette confusion nourrit les tensions politiques et peut rapidement embraser l’opinion publique dans un contexte où les discours identitaires et les accusations mutuelles sont déjà très présents.
Face à ce constat, le gouvernement insiste sur l’urgence d’encadrer le flux d’informations afin de préserver la cohésion sociale. Mais dans la société civile, des voix rappellent que cette lutte contre la désinformation ne doit pas servir de prétexte à restreindre la liberté d’expression ou à museler l’opposition. Les ONG locales, comme la Ligue Ivoirienne des Droits Numériques, plaident pour un équilibre entre régulation et respect des droits fondamentaux.
À moins de deux mois du scrutin, l’espace médiatique ivoirien est ainsi un champ de bataille invisible où s’affrontent discours officiels, mobilisations citoyennes et manipulations numériques. Entre vigilance et méfiance, le pays avance vers son rendez-vous électoral dans un brouillard informationnel où chaque message peut peser sur le climat politique, pour le meilleur ou pour le pire.
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