Par La Rédaction | lementor.net
À quelques mois de l’élection présidentielle de 2025, un air connu refait surface dans l’atmosphère politique ivoirienne : celui des TSO, les « Tous Sauf Ouattara ». Plus qu’un simple slogan, ce mot d’ordre aux accents radicaux s’impose comme un courant de pensée, une posture stratégique et, pour certains, une ultime option face à la perspective d’un quatrième mandat du président Alassane Ouattara. Le retour de ce réflexe politique en dit long sur l’état du débat démocratique en Côte d’Ivoire, mais aussi sur les limites persistantes de l’opposition dans sa capacité à proposer une alternative crédible, structurée et unificatrice.
Né au début des années 2010, le « Tous Sauf Ouattara » s’était imposé comme le point de ralliement d’une opposition fragmentée, incapable de s’accorder sur une candidature commune, mais unie dans son rejet du président. Le slogan, bien qu’électoralement mobilisateur pour certains noyaux durs, avait montré ses failles : il était davantage une coalition du refus qu’un projet politique cohérent. Et pourtant, en 2025, il revient, presque inchangé, comme si la politique ivoirienne tournait en boucle, piégée entre personnalisation du pouvoir et incapacité à renouveler les offres politiques.
Ce retour des TSO est révélateur d’un climat politique crispé, où le débat autour du quatrième mandat d’Alassane Ouattara occupe tout l’espace, reléguant au second plan les enjeux de fond : emploi, éducation, santé, justice sociale, souveraineté économique. Comme si l’avenir du pays ne dépendait que d’un seul homme, que pour ou contre Ouattara, le reste importait peu. Ce rétrécissement du champ politique pose question. Car si l’alternance est une valeur démocratique, elle ne saurait se résumer à un rejet personnalisé. Le « Tous sauf X » n’est pas un projet de société. C’est un cri, pas une vision.
En vérité, la force des TSO est souvent le reflet de la faiblesse des forces alternatives. Quand l’opposition ne parvient ni à incarner l’espoir, ni à construire un discours structuré, ni à incarner une rupture crédible avec le passé, elle se réfugie dans l’anti. Ce rejet devient alors sa colonne vertébrale, en oubliant que la démocratie, ce n’est pas éliminer, c’est convaincre. Que le suffrage universel, ce n’est pas une vendetta, c’est un choix éclairé.
La résurgence du slogan TSO peut également être analysée comme une réaction à la longévité politique d’Alassane Ouattara, dont l’annonce de candidature pour un quatrième mandat suscite autant de controverses que d’approbations. Pour certains, il est le garant de la stabilité, l’homme de la continuité économique, le bâtisseur de l’émergence. Pour d’autres, son maintien incarne un verrouillage démocratique, une fatigue du pouvoir, un refus d’ouvrir un nouveau cycle.
Mais au-delà de ces perceptions, une question demeure : le rejet d’un homme suffit-il à faire nation ? L’histoire ivoirienne a déjà montré que les coalitions de circonstance fondées sur le refus n’accouchent que de fragiles équilibres, vite ébranlés par l’épreuve du pouvoir. Construire une démocratie solide exige plus que des slogans. Elle exige des idées, une capacité à fédérer au-delà des rancœurs, une vision inclusive capable de dépasser les clivages traditionnels.
Le retour des TSO n’est donc pas seulement une stratégie de campagne. C’est le symptôme d’un paysage politique encore en quête de maturité, où les passions personnalisées prennent le pas sur les débats programmatiques. Dans une démocratie apaisée, la meilleure réponse aux ambitions d’un homme ne devrait pas être l’exclusion par principe, mais l’alternance par conviction. L’histoire jugera si 2025 aura été l’année d’un vrai choix ou celle d’un nouveau refus.
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