Par Jean Pierre Assa
Après le sacre historique de la CAN 2023 à Abidjan, remporté dans une ambiance de renaissance nationale, les Éléphants de Côte d’Ivoire affrontent un nouveau défi : se qualifier pour la Coupe du monde 2026. Cette quête mondiale, bien que réaliste, impose rigueur, planification stratégique et continuité dans les efforts de structuration du football ivoirien.
La victoire à la CAN a eu un effet galvanisant. Elle a non seulement restauré la confiance des supporters, mais elle a aussi repositionné la Côte d’Ivoire comme une puissance footballistique du continent. Le parcours héroïque jusqu’au titre, ponctué de retournements de situation et de performances d’anthologie, a révélé une génération dorée, composée de jeunes talents encadrés par quelques cadres expérimentés. La sélection nationale, désormais portée par des joueurs évoluant dans les plus grands championnats européens, dispose d’un réservoir technique et physique qui la rend compétitive sur le plan international.
Mais une CAN, aussi prestigieuse soit-elle, ne garantit pas une qualification mondiale. Les éliminatoires pour le Mondial 2026 se jouent dans un contexte différent, plus long, plus tactique, face à des adversaires africains qui ont eux aussi progressé, à l’image du Maroc, du Sénégal ou du Nigeria. Chaque match devient une bataille psychologique autant qu’athlétique. La régularité, la discipline tactique et la gestion mentale seront déterminantes.
Sur le plan organisationnel, la Fédération Ivoirienne de Football (FIF) s’active en coulisses pour pérenniser les acquis de 2023. Sous la présidence d’Idriss Diallo, la FIF a lancé plusieurs réformes, allant de la formation des entraîneurs à la refonte des infrastructures locales. Un effort particulier est fait pour professionnaliser les structures d’encadrement : analyse de performance, suivi médical, planification nutritionnelle, technologies d’assistance vidéo — autant d’éléments longtemps négligés, désormais intégrés dans le processus de préparation.
La diaspora ivoirienne est également placée au cœur du projet. Des joueurs binationaux comme Evan Ndicka ou Simon Adingra ont montré l’exemple, et la cellule de détection à l’international multiplie les démarches pour enrôler de nouveaux talents, souvent courtisés par d’autres fédérations. Cette politique d’ouverture, si bien encadrée, pourrait renforcer la profondeur du banc et instaurer une saine concurrence dans le groupe.
Mais l’enjeu dépasse le cadre sportif. Une qualification pour le Mondial 2026 serait un levier géopolitique pour la Côte d’Ivoire, un outil de rayonnement diplomatique et culturel, et un moteur économique pour les secteurs du tourisme, du textile, et des médias. L’État, conscient de cela, apporte un soutien logistique et financier accru à la sélection, avec des primes réévaluées, des camps de préparation à l’étranger, et une communication renforcée.
Reste à savoir si cette dynamique sera maintenue dans la durée. Les Ivoiriens, passionnés et exigeants, veulent croire à cette équipe, mais n’oublient pas les désillusions passées. La victoire ne peut être une exception ; elle doit devenir une habitude. Et c’est précisément là que se joue l’avenir des Éléphants : dans leur capacité à passer du statut de héros continentaux à celui d’acteurs majeurs de la scène mondiale.
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