Le limogeage brutal de Choguel Kokalla Maïga, figure majeure de la politique malienne et acteur clé de la transition, marque un tournant préoccupant pour le Mali. Ce départ précipité illustre une gouvernance qui semble s’enfoncer dans une centralisation autoritaire, réduisant au silence ceux qui osent questionner ou nuancer les choix du pouvoir militaire.
Choguel Maïga, bien que controversé, incarnait une voix d’équilibre dans un contexte marqué par des défis immenses : l’insécurité chronique, les tensions internationales et une économie en crise. En tant que Premier ministre, il s’était fait l’avocat d’une souveraineté retrouvée, tout en cherchant à préserver un dialogue avec les partenaires extérieurs. Mais cette volonté de concilier indépendance nationale et réalisme politique a manifestement heurté les cercles du pouvoir.
Le pouvoir militaire, qui s’est consolidé depuis les coups d’État successifs, semble de plus en plus intolérant face à la diversité des opinions, même au sein de son propre camp. Ce limogeage, aussi symbolique que brutal, soulève une question fondamentale : peut-on bâtir une transition stable et inclusive en écartant systématiquement ceux qui remettent en question la ligne dominante ?
Certes, Choguel Maïga n’était pas exempt de critiques. Certains lui reprochaient une communication parfois abrasive et une gestion jugée hésitante sur certains dossiers. Mais n’est-ce pas précisément le rôle d’un chef de gouvernement dans une transition de refléter des courants divers, d’incarner un compromis nécessaire entre des aspirations souvent divergentes ?
Ce licenciement met en lumière un autre problème : la militarisation croissante de la sphère politique. En écartant des figures civiles influentes, les autorités actuelles risquent de s’isoler davantage, tant sur le plan national qu’international. Ce recentrage autoritaire inquiète non seulement les partenaires du Mali, mais aussi une partie grandissante de la population qui, bien qu’attachée à l’idée de souveraineté, aspire à un dialogue ouvert et inclusif.
Le Mali traverse une période cruciale de son histoire, où la quête de légitimité et de stabilité ne peut être gagnée par l’élimination des voix discordantes. Le peuple malien mérite mieux que des règlements de comptes politiques. Il mérite une transition fondée sur la concertation, la transparence et la pluralité.
En réduisant l’espace des débats et en marginalisant des figures comme Choguel Maïga, le pouvoir militaire risque de s’engager dans une voie sans issue. Une dictature, même voilée, ne pourra jamais répondre aux aspirations d’un peuple en quête de paix, de justice et de prospérité durable.
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