Par La Rédaction
Ce mercredi 16 juillet 2025, les deux principales forces de l’opposition ivoirienne – le PDCI-RDA de Tidjane Thiam et le PPA-CI de Laurent Gbagbo – ont signé un acte constitutif de front commun au siège du PDCI à Cocody. Le geste, hautement symbolique, scelle la convergence politique de deux familles longtemps opposées, unies désormais par une volonté affichée : faire barrage au RHDP lors de la présidentielle d’octobre. Mais derrière les sourires de circonstance et les discours d’unité, une question demeure : cette alliance repose-t-elle sur une stratégie structurée ou sur un réflexe défensif face à l’exclusion de leurs leaders du processus électoral ?
L’acte signé par Sébastien Dano Djédjé pour le PPA-CI et Noël Akossi Bendjo pour le PDCI vise à formaliser une plateforme politique commune, avec des organes de coordination paritaires et un engagement à mener ensemble les futures batailles électorales. Les mots choisis sont lourds de sens : ce n’est pas une alliance idéologique, affirment-ils, mais un front “d’intérêt national” fondé sur l’urgence démocratique. Les revendications sont claires : réintégration des figures radiées (Gbagbo, Thiam, Soro, Blé Goudé, Bendjo), réforme de la CEI, audit indépendant du fichier électoral, transparence du dépouillement et dialogue inclusif. Autant de points qui traduisent une défiance persistante à l’égard des institutions actuelles, mais aussi une volonté d’imposer une nouvelle lecture du jeu politique.
Ce rapprochement inédit entre Houphouëtistes et Gbagboïstes marque un tournant. L’histoire récente des deux camps est faite de fractures, de méfiances et d’affrontements. Leur volonté d’unir leurs forces pourrait être perçue comme un pas vers une réconciliation nationale par le haut. Mais cette alliance suscite aussi des interrogations profondes. D’abord sur sa solidité : ni Thiam ni Gbagbo n’ont encore officiellement commenté cette initiative. Ensuite sur sa portée : aucun nom de candidat unique n’a été avancé, et les appareils des deux partis conservent des logiques internes souvent divergentes, voire concurrentes. Enfin, sur son timing : cette entente naît alors que plusieurs leaders d’opposition sont exclus de la liste électorale, ce qui confère à cette alliance un parfum de riposte institutionnelle plus que de vision partagée.
Dans un contexte où l’électorat attend des propositions concrètes et des signes de maturité démocratique, cette initiative sera jugée non pas sur l’intensité de son discours, mais sur sa capacité à articuler un projet crédible, lisible et réaliste pour l’après-2025. La force d’un front ne réside pas seulement dans la dénonciation commune d’un adversaire, mais dans l’élaboration d’un horizon partagé. Pour l’instant, ce front commun ressemble davantage à un pacte de survie électorale face à une machine RHDP bien rodée, qu’à une refondation de l’opposition ivoirienne.
Reste à savoir si cette démarche produira une dynamique d’adhésion populaire ou si elle se limitera à une alliance tactique entre états-majors. Dans tous les cas, elle rebat les cartes et annonce une campagne électorale tendue, où la légitimité démocratique ne se jouera pas seulement dans les urnes, mais aussi dans la perception que les Ivoiriens auront de ceux qui prétendent les représenter.
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