Par La Rédaction
L’exclusion de Tidjane Thiam de la liste électorale définitive, suivie du report stratégique de la marche nationale prévue initialement pour le 11 juin, marque un moment charnière pour le Parti Démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI-RDA). À quatre mois d’une élection présidentielle déjà sous haute tension, ces événements illustrent les fragilités du système électoral, tout en révélant les dilemmes internes d’un parti en quête de reconquête nationale.
Sur le plan institutionnel, cette situation ravive les discussions autour du cadre juridique régissant l’éligibilité à la présidentielle en Côte d’Ivoire, notamment les dispositions liées à la nationalité. La radiation de Tidjane Thiam, investi candidat par le PDCI en avril 2025, soulève des interrogations quant aux procédures d’examen de la liste électorale. En l’absence de décision judiciaire publique à ce stade, plusieurs acteurs politiques et observateurs appellent à davantage de clarté et de transparence dans l’application des critères constitutionnels. Pour certains, cette affaire met en lumière la nécessité d’un débat serein sur la réforme du code électoral et sur les mécanismes de validation des candidatures.
Face à cela, la réponse du PDCI – le report de sa marche au 14 juin – témoigne d’une volonté de ne pas céder à l’impatience ni à la provocation. Ce report est interprété comme une manœuvre tactique, visant à garantir une mobilisation nationale plus large, notamment avec la venue de délégations de l’intérieur, et à donner à l’événement un impact symbolique plus fort. En optant pour un samedi, jour non ouvré, le parti évite une confrontation directe avec les forces de l’ordre en semaine, tout en renforçant la visibilité médiatique de son action.
Mais au-delà de la posture, le risque politique est réel pour le plus vieux parti du pays. Une mobilisation faible, désorganisée, ou marquée par des incidents serait exploitée par ses adversaires pour fragiliser davantage sa légitimité. À l’inverse, une manifestation massive, pacifique et bien encadrée pourrait permettre au PDCI de regagner du terrain dans l’opinion publique, notamment auprès des jeunes, des indécis et de la diaspora, qui voient en Tidjane Thiam une figure de renouveau.
La situation actuelle pousse également le PDCI à redéfinir sa stratégie politique à moyen terme. Doit-il tout miser sur le rétablissement de la candidature Thiam ? Doit-il envisager une alternative interne de rechange ? Ces interrogations traversent désormais les rangs du parti. La séquence en cours révèle aussi une forme de résilience stratégique, fondée sur le droit à la contestation institutionnelle, mais dans les limites de la légalité républicaine.
Enfin, cette crise vient tester la capacité de structuration et de modernisation du PDCI. En plaçant sa campagne autour d’une personnalité au profil international, le parti a voulu opérer une rupture avec ses réflexes classiques. L’éviction de Thiam ne remet pas seulement en cause une candidature : elle questionne l’adaptabilité du parti à un contexte électoral mouvant, et sa capacité à renouveler sa base tout en consolidant son héritage.
Le 14 juin prochain, c’est donc bien plus qu’une marche que prépare le PDCI : c’est un examen de maturité politique, face à un système institutionnel exigeant et à une scène électorale qui, désormais, se joue aussi sur le terrain symbolique de la légitimité et de la mobilisation populaire.
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