Par La Rédaction | lementor.net
La scène politique ivoirienne s’anime au rythme des dépôts de candidature pour l’élection présidentielle d’octobre 2025. Parmi elles, deux noms cristallisent à la fois l’attention et la controverse : Tidjane Thiam, président du PDCI-RDA, et Laurent Gbagbo, président du PPA-CI. Or, un fait essentiel demeure : ni l’un ni l’autre ne figurent aujourd’hui sur la liste électorale officielle.
Pour Tidjane Thiam, la situation est liée à son long exil politique et à un parcours international qui l’a tenu éloigné de la vie administrative ivoirienne. Pour Laurent Gbagbo, l’obstacle est juridique : une condamnation en Côte d’Ivoire le prive de ses droits civiques, malgré la grâce présidentielle dont il a bénéficié. Dès lors, une question fondamentale surgit : que signifient ces candidatures ?
Elles peuvent d’abord être lues comme un message d’espoir à l’endroit de leurs partisans. Dans un contexte politique souvent verrouillé, annoncer sa candidature, même incertaine, c’est maintenir vivante la flamme de l’alternance et nourrir l’imaginaire collectif d’un possible renouveau. Mais elles peuvent aussi se lire comme un refus de mourir politiquement. Gbagbo comme Thiam savent que l’absence prolongée du débat électoral équivaudrait à un effacement progressif. Le geste de candidature devient alors un acte de survie politique.
Il y a également une dimension de défiance vis-à-vis des institutions : poser sa candidature malgré les obstacles légaux, c’est questionner la légitimité d’un système jugé trop restrictif ou biaisé. Ce geste peut apparaître comme une volonté de provoquer le débat, de forcer la société à se confronter à la question de l’exclusion politique. Pour certains, cela s’apparente à de l’entêtement ; pour d’autres, à un désir ardent de justice.
À l’international, de tels cas ne sont pas inédits. On se souvient de Nelson Mandela, emprisonné pendant 27 ans, mais dont la candidature et l’éligibilité furent rendues possibles après sa libération en 1990, ouvrant la voie à son élection en 1994. À l’opposé, Alexeï Navalny en Russie ou Lula da Silva au Brésil avant l’annulation de sa condamnation ont vu leurs ambitions présidentielles bloquées par des obstacles judiciaires, avec des fortunes diverses : Lula a fini par rebondir et redevenir président, là où Navalny a été définitivement écarté. En Afrique, des figures comme Hama Amadou au Niger ou Kizza Besigye en Ouganda ont également tenté de se présenter malgré des condamnations ou des interdictions, souvent sans succès.
Ces exemples montrent que la candidature dans une telle situation est toujours un pari incertain : elle peut déboucher sur un triomphe historique si les circonstances basculent, ou sur une exclusion définitive si la lettre de la loi l’emporte. Pour la Côte d’Ivoire, la question reste donc entière : est-il réellement possible, dans ces conditions, d’espérer être retenu ? L’histoire dira si ces candidatures de Thiam et Gbagbo relèvent de l’espérance lucide ou de la résistance symbolique.
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