Par Dohotanui Yeo | Lementor.net
Dans un climat politique déjà tendu à l’approche de l’élection présidentielle d’octobre 2025, le collectif d’avocats défendant les militants du Parti des Peuples Africains – Côte d’Ivoire (PPA-CI) a pris la parole lors d’une conférence de presse à Abidjan pour dénoncer ce qu’il considère comme de graves atteintes aux droits fondamentaux. Au centre de leurs préoccupations figurent les cas de Moïse Lida Kouassi, ancien ministre de la Défense, et de Koné Boubacar, ancien directeur du protocole d’État et ambassadeur, actuellement détenus. Selon le collectif, leur arrestation s’est faite en violation des procédures spéciales prévues par la loi pour les anciens hauts responsables, procédure qui aurait dû encadrer toute action judiciaire à leur encontre.
Les avocats ont fustigé ce qu’ils qualifient d’« instrumentalisation de la justice » à des fins politiques, dénonçant l’usage abusif de chefs d’accusation lourds comme les actes de terrorisme ou la participation à une organisation criminelle, sans respect des garanties minimales prévues par la Constitution. Me Kanon Blé a rappelé que « la loi impose un cadre clair et des procédures particulières dans de tels cas, mais ces dispositions ont été ignorées, ce qui remet en cause la légalité même de ces arrestations ». Pour Me Sylvain D. Tapi, la situation va bien au-delà d’irrégularités procédurales : « Nous sommes face à des atteintes graves à la présomption d’innocence, à des gardes à vue prolongées sans accès à un conseil, et à des conditions de détention qui relèvent du traitement dégradant. »
Parmi les exemples cités figure le cas d’une élue suppléante contrainte de dormir sur un matelas souillé, sans accès à des produits d’hygiène de base, ou celui de militants empêchés de quitter Abidjan après une convocation, sans décision judiciaire pour justifier cette restriction. Pour les avocats, ces pratiques constituent des violations flagrantes de la liberté de circulation et des droits de la défense, et fragilisent la crédibilité du processus électoral à venir.
Le collectif entend agir sur plusieurs fronts. Il prévoit de saisir le procureur général près la cour d’appel d’Abidjan afin de demander la levée des réquisitions jugées attentatoires aux droits de leurs clients, ainsi que le Conseil supérieur de la magistrature pour alerter sur les dérives constatées. Par ailleurs, des démarches seront entreprises auprès d’organisations nationales et internationales de défense des droits humains, afin que ces dernières observent de près l’évolution du dossier et interpellent les autorités sur la nécessité de respecter l’État de droit.
Cette prise de parole marque un nouvel épisode dans la relation souvent conflictuelle entre pouvoir et opposition en Côte d’Ivoire. En mettant en lumière ces dossiers sensibles, les avocats du PPA-CI posent la question cruciale de la neutralité de la justice dans un contexte électoral, et appellent à un sursaut institutionnel pour garantir des élections transparentes, inclusives et respectueuses des libertés fondamentales.
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