Le FPI Dénonce Une Grogne Dans Le Secteur Des Télécommunications Et Des TIC (Déclaration)

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DECLARATION DU FRONT POPULAIRE IVOIRIEN SUR L’ARTICLE 26 DE L’ANNEXE FISCALE DE LA LOI N°2013-908 DU 26  DECEMBRE 2013 PORTANT BUDGET DE L’ETAT POUR L’ANNEE 2014 ET RELATIF A L’AMENAGEMENT DU REGIME FISCAL DES ENTREPRISES DE TELECOMMUNICATIONS ET DES TIC

Dans l’annexe fiscale de la loi des finances 2014, le gouvernement a pris des mesures touchant au secteur des TIC qui, si on n’y prend garde, risquent de provoquer de graves déflagrations. 

Ainsi, la grogne qui sévit ces derniers temps dans le secteur des télécommunications et des TIC n’est pas du tout rassurante au regard des difficultés que connaît notre pays. En effet, dans son exposé liminaire, à l’adoption de l’annexe fiscale 2014, le gouvernement justifie de nouvelles taxes ainsi qu’un nouveau régime fiscal à la charge des opérateurs des télécommunications et des TIC par le fait que la contribution fiscale dudit secteur serait en deçà de leurs performances réelles en comparaison avec l’ensemble des autres secteurs de l’activité économique nationale. Cette situation s’avère d’autant plus alarmante que cette grogne commence à gagner toutes les couches de la société déjà durement affectées par la crise socio économique que nous subissons du fait de la crise post-électorale. La mauvaise orientation de l’annexe fiscale de la loi N° 2013-98 du 26 décembre 2013 portant budget de l’Etat pour renflouer les caisses de l’Etat vides du fait de la mal gouvernance suscite de réels motifs d’inquiétude. Le FPI, Parti responsable, ne peut rester indifférent face à ces graves dérives.

I –  LES FAITS

Le gouvernement actuel a fait voter dans la précipitation le 26 Décembre 2013, par le parlement  monocolore, la loi des finances n° 2013-98 dont l’article 26, porte aménagement du régime fiscal des entreprises de télécommunications et des technologies de l’Information et de la Communication. Cette loi modifie les articles 1130, 1132 du Code Général des Impôts et crée un article 1141.

 Les aménagements institués par l’article 26 précité portent sur :

  • l’augmentation du taux de l’impôt sur les Bénéfices Industriels et Commerciaux (BIC) des opérateurs du secteur des télécommunications et des TIC, de 25% à 30% ;
  • l’augmentation du taux de la taxe sur les télécommunications de 3% à 5%, avec élargissement de l’assiette;
  • l’instauration d’une nouvelle taxe à la charge des consommateurs, et assise sur le coût des communications téléphoniques et des accès internet, dont le taux n’est pas précisé dans le  texte publié au Journal Officiel mais finalement fixé par une note du Directeur Général des impôts;
  • l’obligation nouvelle de souscrire 20% du montant transféré en bons du Trésor public, pour des Entreprises du Secteur qui transfèrent des dividendes hors de la Côte d’Ivoire.

II – NOS OBSERVATIONS ET ANALYSES

A – De l’augmentation du taux du Bénéfice Industriel et Commercial des opérateurs du secteur des Télécommunications et des TIC

L’article 26 de l’annexe fiscale 2014 fait passer l’impôt BIC de 25 à 30% uniquement pour les entreprises du secteur des télécommunications et des TIC.

Outre ce nouveau taux déjà contestable au regard de l’injustice fiscale qu’elle consacre, une note de service du Directeur Général des Impôts de Côte d’Ivoire, précise que cette mesure est applicable pour l’exercice 2013.

L’analyse de cette loi et ses conditions d’application nous ramène à deux remarques essentielles : une de forme et l’autre de fond.

Sur la forme,  la note du Directeur Général des Impôts qui confère  un effet rétroactif à l’application de l’annexe fiscale 2014 est contraire au droit car portant atteinte au principe de la non rétroactivité de la loi.

En effet, à l’exception de la matière pénale qui obéit à d’autres principes, toute loi plus sévère n’est rétroactive que lorsque la loi elle-même le précise expressément. Dans le cas d’espèce, le Directeur Général des Impôts serait-il au-dessus de la loi ?

Dans le fond, hormis cette violation flagrante de la loi, cette mesure dans son ensemble, est contraire à l’esprit de justice fiscale en ce qu’elle impacte fortement un secteur qui, aujourd’hui, crée le plus grand nombre d’emplois directs et indirects.

En effet, s’il est clair qu’au regard des chiffres d’affaires déclarés, les multinationales n’auront aucun mal à supporter cette augmentation, en revanche, les entreprises nationales spécialisées dans l’installation des lignes, des pylônes dans la maintenance ou même dans la location d’infrastructures du secteur ne pourront quant à elles survivre à une telle pression fiscale et se verront contraintes de fermer boutique car de nombreuses sociétés du secteur n’ont pas encore jugulé l’impact de la crise post-électorale de 2010. La conséquence logique d’une telle situation est la baisse de la qualité dans le secteur et surtout la perte d’emploi pour de nombreux jeunes.

De plus, les entreprises ayant effectué de lourds investissements se rapportant à la licence 3G (téléphonie de troisième génération) et qui continuent de subir les effets de l’insécurité et du vol des câbles et autres éléments déployés dans le cadre de leur couverture réseau auront à coup sûr des problèmes à investir de nouveau à cause de cette nouvelle disposition.

Par ailleurs, le Plan National de Développement 2012-2015 (PND) adopté par le gouvernement  permet de relever que le secteur des télécommunications au même titre que ceux  de l’agriculture, de l’agro-industrie, du pétrole, du gaz et du transport sont porteurs de croissance.

Ainsi, dans le rapport « Perspectives Economiques de l’Afrique 2013 » de l’OCDE, la partie réservée à la Côte d’Ivoire  révèle que le secteur des TIC contribue pour environ 6% au PIB.

L’on se demande les motivations du ciblage du seul secteur des TIC par cette nouvelle taxe alors que le gouvernement ne cesse d’affirmer vouloir en assurer le développement.

En outre les donnée-pays de la Banque Mondiale ont révélé pour 2013, les chiffres suivants au titre du taux d’imposition totale en proportion des bénéfices commerciaux:

  • Cote d’Ivoire (46,4%)
  • Ghana (22,9%)
  • Sénégal (48,5%)
  •  Nigeria (33,8%)
  • Afrique du Nord et Moyen-Orient (32,2%)
  • UE (41, 9%)

Cet indicateur qui fournit, d’une manière plus générale, une appréciation du niveau d’imposition (en proportion des bénéfices réalisés) des entreprises opérant en Côte d’Ivoire, laisse entrevoir la forte pression fiscale qui existe dans notre pays et qui n’est pas de nature à attirer les opérateurs économiques.

B – De l’augmentation du taux de la taxe sur les télécommunications avec élargissement de l’assiette de l’impôt

Non seulement la nouvelle loi fiscale fait passer le taux de la taxe sur les télécommunications qu’elle a rebaptisée taxe sur les entreprises de télécommunications et des TIC, de 3 à 5%, mais encore, elle élargit l’assiette de l’impôt au chiffre d’affaire hors taxe des activités liées à « l’interconnexion, vente de capacités actives et passives des services de l’internet, des locations de liaison et de pylônes ».

En effet, à travers cet élargissement, certains opérateurs qui font par exemple de l’interconnexion et la vente de capacité actives se trouveront  doublement frappés par cet impôt puisque le chiffre d’affaire hors taxe de chaque activité est touché. Par cette attitude, l’Etat constitue en lui-même le frein aux incitations et à l’atteinte des objectifs qu’il fixe pour un développement rapide et soutenu par le secteur privé. Cela dénote  des incohérences criardes entre les divers principes qu’il décrète et les actions concrètes mises en œuvre.

Cette autre mesure constitue une pression de trop et un non respect par l’Etat des engagements contractuels pris par l’Etat au moment de l’octroi des licences aux opérateurs du secteur  qui ont quand même payé un lourd tribut pendant la crise post-électorale et qui ne commencent qu’à émerger progressivement.

C – De l’instauration d’une nouvelle taxe de 3% à la charge des consommateurs, et assise sur le coût des communications téléphoniques et des accès internet

Dans la forme, cette taxe est sujette à suspension, puisque le taux n’est pas précisé dans le texte porté à la connaissance des assujettis et des contribuables. Cette non fixation du taux dans la loi est un acte anti-constitutionnel, car tout impôt ou taxe relève constitutionnellement de la loi à moins que celle-ci dispose expressément de transférer cette compétence à l’exécutif.

Une fois encore, cette situation démontre la précipitation dans lesquelles certaines décisions importantes sont prises, sans concertation avec les opérateurs des domaines concernés et sans étude d’impact réel pour les populations. Elle équivaut à une augmentation tout simplement de la TVA applicable à ce secteur au même titre que celle instituée sur les produits dont l’abus peut être dangereux pour la santé tel que l’alcool ou le tabac.

La paupérisation de plus en plus galopante de la population ivoirienne depuis l’avènement du gouvernement Alassane Dramane OUATTARA constitue un motif légitime de rejet de cette nouvelle taxe.

En effet, pendant que le peuple peine à trouver de quoi survivre, le gouvernement actuel n’a trouvé mieux que de le rançonner à nouveau en instituant une taxe sur chaque appel ou sur chaque session internet.

Cette mesure est de nature à impacter considérablement et négativement le pouvoir d’achat de la population déjà amoindri et à entrainer une hausse automatique des communications et des services TIC ou à tout le moins freinerait la baisse du prix des communications pourtant inscrite au Plan National de Développement (PND).

Cela contribuera à réduire automatiquement la compétitivité d’un secteur aussi vital que celui des TIC qui emploie plus de 200 000 personnes en CI.

D – De l’obligation nouvelle de souscrire 20% du montant transféré en bons du Trésor public, pour celles des Entreprises du Secteur, qui transfèrent des dividendes hors de Côte d’Ivoire

L’obligation de souscrire 20% du montant des transferts en bon du trésor public au motif de lutter contre la fuite des capitaux que pourrait connaître notre pays est contraire aux textes de l’UEMOA.

Les articles 96 et suivants du traité de cette organisation disposent que « les restrictions aux mouvements, à l’intérieur de l’union, des capitaux appartenant à des personnes résidant dans les Etats membres, sont interdites ».

En imposant donc une telle restriction au transfert des dividendes sans définir l’espace concerné, cette disposition  transgresse les principes du traité de l’UEMOA dont la Côte d’Ivoire est pourtant signataire.

 III –  NOTRE POSITION

Au regard de ce qui précède, le Front Populaire Ivoirien :

  • estime que la hausse de l’impôt BIC uniquement pour les entreprises de télécommunications et des TIC qui contribuent à plus de 6% du PIB et l’augmentation du taux de la taxe sur les entreprises de télécommunications et des TIC constituent des mesures iniques et discriminatoires qui ralentiront à coup sûr l’activité des opérateurs de ce secteur. L’applicabilité d’une telle mesure à l’exercice clos le 31 décembre 2013 risque d’avoir des effets désastreux sur les investissements dans le secteur, et partant d’occasionner la fermeture de nombreux établissements de sous-traitants et entreprises prestataires avec son lot de chômage ;
  • stigmatise l’institution d’une nouvelle taxe pour les consommateurs. Car, cela est contraire à tout principe de développement soutenu de nos jours par une  plus grande accessibilité aux TIC ;

  • note que l’obligation de souscrire 20% du montant des transferts en bon du trésor public exigées désormais aux entreprises qui transfèrent des dividendes hors de la Côte d’Ivoire sans aucune précision de l’espace viole gravement les dispositions du traité de l’UEMOA;

  • relève l’incongruité de cette mesure émanant d’un gouvernement qui ne cesse de clamer de faire de la Côte d’Ivoire un « pays émergent » d’ici 2020 ;

  • affirme de ce fait que le slogan de « faire de la Côte d’Ivoire un pays émergent » n’est qu’une démagogie d’Etat, car on ne peut vouloir une chose et son contraire à la fois.

  • demeure persuadé que l’article 26 de l’annexe fiscale 2014 porte les germes d’un désastre social et économique pour la Côte d’Ivoire.

Demande en conséquence au gouvernement son retrait de l’ordonnancement juridique afin de le modifier en tenant compte de l’environnement économique des entreprises et des difficultés des consommateurs.                                                                                                

Fait à Abidjan, le 12 mars 2014

 

 

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