Par Bakery Cissé -Lementor.net
L’investiture du président Alassane Ouattara, ce lundi 8 décembre 2025, n’a pas seulement attiré les regards du continent. Elle a aussi scellé un tournant majeur dans les relations entre la Côte d’Ivoire et les États-Unis. La présence remarquée de la délégation américaine, conduite par Jacob Helberg, sous-secrétaire d’État adjoint aux Affaires économiques, a donné le ton : Washington n’est plus un partenaire éloigné, mais un allié investi dans la transformation structurelle du pays.
Et ce partenariat a désormais un symbole : l’échangeur de Koumassi, vitrine d’un développement concret financé à travers le Millennium Challenge Corporation (MCC). Dans un paysage international marqué par les tensions géopolitiques, les intérêts stratégiques et la quête de sécurité énergétique, cette coopération bilatérale prend une dimension nouvelle : celle d’une alliance économique assumée, tournée vers la modernisation et la souveraineté.
Ce lundi, en foulant le sol de Koumassi, les responsables américains ont envoyé un message limpide : l’avenir économique de la Côte d’Ivoire compte pour les États-Unis, et les infrastructures construites ensemble sont autant de ponts vers un partenariat durable.
Ce n’est pas un hasard si le MCC est au cœur de cette relation. Avec 524,7 millions de dollars investis depuis 2017, le programme a accouché d’un projet emblématique : la transformation du carrefour de Koumassi, autrefois noyé dans le chaos des embouteillages, en un nœud routier fluide, connecté, à l’image d’une capitale qui se réinvente. Le compact MCC, arrivé à terme en août 2025, a tenu ses promesses. Ce n’est plus un simple échangeur : c’est un accélérateur de croissance. Le port d’Abidjan respire mieux, les camions circulent plus vite, les entreprises économisent des millions chaque année, et la population découvre une mobilité plus sûre, plus rapide, plus moderne.
Au-delà du béton et des poutres préfabriquées localement, ce projet a servi d’outil de montée en compétences pour des milliers de jeunes ivoiriens formés aux métiers techniques. Comme le rappelait Jason Small, vice-président par intérim du MCC, Abidjan n’a pas seulement gagné une infrastructure : elle a gagné une génération prête à s’inscrire dans l’économie globale. Les États-Unis, eux, identifient une terre d’opportunités, un marché emergent où se conjuguent stabilité politique, croissance solide et potentiel industriel.
Cette coopération, pourtant, ne s’arrête pas à Koumassi. Elle s’élargit. Elle s’approfondit. Elle prend de la hauteur. Avec le Regional Energy Compact de 322,5 millions de dollars signé en septembre 2025, l’énergie devient le nouveau terrain de jeu des deux partenaires. Stockage par batteries, lignes haute tension, interconnexion régionale… La Côte d’Ivoire se positionne comme le futur hub énergétique de l’Afrique de l’Ouest, capable d’alimenter ses voisins et d’attirer les industries américaines en quête de fiabilité et de coûts maîtrisés. Et lorsque Washington parle de renforcer la stabilité côtière, de diversifier les chaînes d’approvisionnement en minerais critiques ou de sécuriser la zone golfo-guinéenne, Abidjan apparaît comme un pivot incontournable.
Mais dans cette visite officielle pleine d’enjeux, un moment inattendu a marqué les esprits : l’échange de maillots entre le chef de la délégation américaine et le maire de Koumassi. Un geste simple, presque anodin, mais qui dit tout. Les routes, le commerce, l’énergie, c’est l’État. Le football, c’est le peuple. Et entre les deux, un pont se crée, comme pour rappeler que la diplomatie la plus solide est celle qui s’enracine dans les passions humaines.
Cette photo de deux maillots levés côte à côte raconte une histoire plus profonde : celle de deux nations qui apprennent à se parler autrement, à se rapprocher, à se comprendre. Une histoire qui s’est déjà écrite lors de la visite d’Antony Blinken en 2024, où le sport avait servi d’outil de cohésion sociale et de passerelle entre cultures.
À l’aube d’un nouveau mandat présidentiel, et au moment où les défis climatiques, sécuritaires et économiques redessinent les priorités mondiales, le partenariat Côte d’Ivoire – États-Unis se veut plus stratégique que jamais. L’échangeur de Koumassi n’est plus seulement un chantier réussi. C’est le symbole d’une relation qui prend de la vitesse. D’un pays qui mise sur les infrastructures pour consolider sa souveraineté. Et d’un allié américain qui voit en Abidjan un acteur régional fiable, ambitieux, incontournable.
Si le MCC a construit un pont physique, il a surtout bâti un pont politique. Et à en juger par l’enthousiasme partagé, ce pont ne fait que s’allonger.
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